IV. -- Avantages que l'on trouve à s'abstenir de paroles et d'actions inutiles.
En lisant ces paroles d'Isaïe : « Glorificaberis dum non facis vias tuas, etc. : Tu seras glorifié si tu ne suis pas tes inclinations » (Isaïe, LVIII, 13), elle comprit que si, après avoir conçu divers projets, on renonce au plaisir de les exécuter parce qu'ils n'ont aucune utilité pour le bien, on obtiendra ce triple avantage : 1° de trouver en Dieu de plus grandes délices : « DeIectaberis in Domino : Tu te réjouiras dans le Seigneur (Isaïe, LVIII, 14); 2° de rester moins sous l'empire des pensées dangereuses: « Sustollam te super altitudinem terrae : Je t'élèverai sur les hauteurs de la terre » (Ibid.) ; 3° enfin, de recevoir du Fils de Dieu, parce qu'on aura noblement résisté à 1a tentation et remporté la victoire, une part spéciale aux mérites de sa très sainte vie, selon cette parole: « Et cibabo te haereditate Jacob patris tui : Et je te donnerai pour nourriture l'héritage de Jacob ton père » (Ibid.) Dans cet autre texte du même prophète : « Ecce merces ejus cum eo : Il porte avec lui sa récompense » (Ibid., XL, 10), elle vit que le Seigneur, dans son amour pour ses élus, daigne être lui-même leur récompense. II s'unit à eux avec tant de douceur, que la créature, objet d'un si grand amour, peut affirmer en toute vérité qu'elle est récompensée au delà de ses mérites : «Et opus illius coram illo: et son oeuvre est devant lui »(Ibid.). Quand l'âme s'abandonne complètement à la sainte Providence, et cherche en tous ses actes à accomplir la divine volonté, alors, par la grâce du ciel, elle apparaît déjà parfaite aux yeux de Dieu.
V.-- Le repentir amène promptement la délivrance.
Pendant qu'elle récitait ce répons de la vigile de Noël : « Sanctificamini, filii Israel 1 : Sanctifiez-vous, fils d'Israël », elle comprit que si une âme déplore sans retard les fautes qu'elle a commises et regrette de n'avoir pas accompli tout le bien qui lui était possible, que si elle est en outre résolue à se soumettre désormais aux préceptes de Dieu, elle paraît aux yeux de la Majesté divine vraiment sanctifiée comme ce lépreux de l'Évangile qui fut purifié de ses fautes par la parole du Seigneur: « Volo, mundare: Je le veux, sois purifié »(Matth.,VIII,3).
Par cette parole: « Cantate Domino canticum novum : Chantez au Seigneur un cantique nouveau » (Isaïe, XLII, 19), il lui fut montré que celui qui chante avec grande ferveur chante un cantique nouveau. En effet, il se trouve déjà entièrement renouvelé et agréable à Dieu, perce qu'il a reçu la grâce de diriger vers le Seigneur toute son intention.
1. Répons de la vigile de la Nativité du Seigneur.
VI. -- Dieu broie ses élus pour les guérir.
Dans ce texte d'Isaïe : « Spiritus Domini super me : L'Esprit du Seigneur est sur moi » (Isaïe, LXI, 1), et ce qui suit: « ut mederer contritos corde: pour guérir les coeurs brisés », elle vit que le Fils de Dieu, ayant été envoyé pour, guérir ceux qui ont le coeur brisé, a coutume d'éprouver ses élus par une souffrance, souvent légère ou même extérieure, pour avoir occasion d'y porter remède. Dans ce cas, il s'approche de l'âme et n'enlève pas l'épreuve, car si cette épreuve brise le coeur, elle n'est pas nuisible, mais il s'applique au contraire â guérir dans sa créature tout ce qu'il juge devoir lui être dangereux ou funeste.
Tandis que le choeur chantait le psaume cent neuvième, elle comprit à ces mots : « in splendoribus sanctorum : Dans les splendeurs des saints », que la lumière de Dieu est immense et incompréhensible. Si tous les saints, depuis Adam jusqu'au dernier homme, en avaient une connaissance personnelle aussi claire, aussi profonde et aussi vaste qu'il est possible à une créature (la connaissance de chacune étant distincte de celle de l'autre) ; si en outre le nombre des saints était mille et mille fois plus grand, la Divinité resterait cependant inépuisable et infiniment au-dessus de toute intelligence créée. C'est pourquoi il n'est pas dit : In splendore, mais : « in splendoribus sanctorum, ex utero ante luciferum genui te : Dans les splendeurs des saints, je vous ai engendré de mon sein avant l'aurore. »
VII. -- Chacun doit porter sa croix à la suite de Jésus-Christ.
Aux vêpres d'un martyr, comme on chantait l'antienne: « Qui vult venire post me : Celui qui veut venir après moi », elle vit le Seigneur s'avancer dans un chemin rempli de verdure et de fleurs, mais étroit et hérissé d'épines. II semblait précédé d'une croix qui écartait les branches épineuses et rendait la voie praticable. Le Seigneur se tournait avec un visage serein vers ceux qui marchaient derrière lui et invitait les siens à le suivre, disant : « Qui vult venire post me, abneget semetipsum, et tollat crucem suam et sequatur me, etc. : Que celui qui veut venir après moi se renonce lui-même, qu'il porte sa croix et qu'il me suive. » En écoutant ces mots, elle comprit que la croix de chacun était sa tentation personnelle : par exemple, c'est une croix pour certaines âmes de supporter le joug de l'obéissance en exécutant des ordres contraires à leurs goûts. D'autres sont accablés sous le poids d'infirmités qui les empêchent d'accomplir les désirs de leur volonté, et autres choses de ce genre. Nous devons donc porter notre croix, en souffrant volontiers tout ce qui est dur et pénible, et nous devons aussi; autant que possible, ne rien négliger de ce qui peut glorifier Dieu.
VIII. -- La correction trop sévère se change en mérites pour celui qui la supporte.
En récitant ce verset : « Verbe iniquorum: Les paroles des méchants » (Ps. LXIV, 4), elle comprit que si une personne a commis une faute par suite de la faiblesse humaine et en reçoit une correction trop rigoureuse, cet excès de sévérité provoque la miséricorde de Dieu et procure au coupable une augmentation de mérites.
IX. -- C'est par miséricorde que Dieu châtie les fidèles. Le pervers est abandonné à sa perversité.
A la fin du Salve Regina, comme on chantait cette invocation: misericordes oculos, elle souhaita d'obtenir la santé du corps. Le Seigneur lui dit en souriant : « Ne sais-tu pas que je dirige vers toi les regards les plus miséricordieux, lorsque tu es éprouvée par les souffrances corporelles, ou que tu ressens les angoisses de l'âme? »
En la fête de plusieurs martyrs, quand on chanta ces mots : gloriosum sanguinem 1, elle comprit que le sang répandu pour le Christ est loué dans la sainte Écriture, bien que naturellement le sang inspire une certaine horreur. De même il lui sembla que, dans la vie religieuse, certaines dérogations à la règle réclamées par l'obéissance ou la charité fraternelle plaisent tant à Dieu, qu'elles peuvent être louées et appelées glorieuses.
Un autre jour elle comprit qu'un secret jugement de Dieu permet parfois à un homme pervers d'interroger une âme privilégiée afin de lui dérober la connaissance de quelque secret, et d'en obtenir une réponse propre à le fixer dans son erreur. Dieu le permet ainsi pour le malheur du pervers et l'affermissement des bons. C'est pourquoi le prophète Ézéchiel s'exprime en ces termes : « Qui posuerit munditias suas in corde suo, et scandalum iniquitatis suae contra faciem suam, et venerit ad prophetam, interrogans eum pro me 2 : Ego Dominus respondebo ei in multitudine immunditiarum suarum, ut capiatur in corde suo: Celui qui a renfermé ses impuretés dans son coeur, qui a mis le scandale de son iniquité devant sa face, et qui viendra ensuite trouver le prophète et l'interrogera en mon nom, je lui répondrai, moi le Seigneur, selon la multitude de ses infamies, afin qu'il soit pris par son propre coeur. » (Ezech., xrv, 4, 5.)
1. Du répons : Viri sancti gloriosum sanguinem etc., (Commun des Martyrs ).
2. Dans la Vulgate nous lisons: interrogans per eum me.
X. -- Celui qui vient de tomber doit se confier en Dieu. Il n'y a point de péché sans consentement.
Par les paroles qui sont chantées en l'honneur de saint Jean : « Haurit virus hic lethale 1 : Il but le poison mortel », elle comprit que la vertu de la foi préserva Jean du poison mortel, comme la résistance de la volonté conserve l'âme sans tache, malgré le venin mortel qui pourrait s'insinuer dans le cœur, contrairement aux dispositions de la volonté.
En récitant ce verset : « Dignare Domine die isto : Daignez, Seigneur, pendant ce jour », elle reçut cette lumière. Si l'homme qui a prié Dieu pour être préservé de toute faute, semble, par un secret jugement du Seigneur, avoir péché grièvement en quelque point, il trouvera cependant la grâce toujours prête à lui servir de bâton d'appui pour faciliter sa pénitence.
1. Paroles tirées de l'ancienne Vie de saint Jean par Abdias, chap.V, et du répons de l'office de la fête.
XI. -- Comment nous devons bénir Dieu. II faut reprendre les délinquants.
Pendant le chant du répons Benedicens1, elle vint se présenter au Seigneur et implorer sa bénédiction, comme si elle avait personnifié Noé lui-même. Quand elle eut reçu cette bénédiction, le Seigneur parut à son tour lui demander la sienne. Elle comprit alors que l'homme bénit Dieu quand il se repent de l'avoir offensé et lui demande son secours pour ne plus tomber dans le péché ; Dieu voulant montrer que cet acte lui était agréable, s'inclina profondément pour recevoir cette bénédiction, comme si le salut du monde en devait être la conséquence.
Par ces mots : « Ubi est frater tuus Abel ? Où est Abel ton frère ? » (Gen., IV, 9), elle comprit que Dieu demandera compte à chaque religieux des fautes que ses frères commettent contre la règle, parce que ces fautes auraient pu être évitées si l'on avait averti le frère coupable ou prévenu l'abbé. Cette excuse de quelques uns : Je ne suis pas chargé de corriger mon frère, ou encore : Je suis plus méchant que lui, ne sera pas mieux accueillie de Dieu que ces paroles de Caïn : « Numquid custos fratris mei sum ego? Suis-je le gardien de mon frère? » (Gen., IV, 9). Car, devant le Seigneur, chaque homme est tenu à retirer son frère du mauvais chemin et à l'exciter au bien. Toutes les fois qu'il néglige d'écouter sur ce point la voix de sa conscience, il pèche contre Dieu. C'est en vain qu'il prétexte n'avoir pas mission de corriger son frère, car Dieu la lui donne d'après le témoignage de sa conscience. S'il néglige ce devoir, il lui en sera demandé compte, et plus à lui-même peut-être qu'au supérieur qui parfois est absent ou n'a pas remarqué la faute. De là cette menace : « Vae facienti, vae, vae consentienti : Malheur à celui qui fait le mal, deux fois malheur à celui qui y consent. » C'est évidemment consentir au mal que de se taire, quand il aurait suffi de quelques paroles pour éviter une atteinte à la gloire de Dieu.
1. Au dimanche de la Sexagésime. Voici le texte de ce répons qui ne se trouve plus au bréviaire monastique : « -R. : Benedicens ergo Deus Noe dixit : Nequaquam ultra maledicam terrae, propter hominem, Ad imaginem quippe Dei factus est homo. - V. : Hoc erit signum foederis inter me et te ; arcum meum ponam in nubibus caeli, : - R. : Dieu, en bénissant Noé, dit : Je ne maudirai plus le terre à cause de l'homme, Car l'homme a été fait à l'image de Dieu. -V : Je poserai mon arc dans les nuées : ce sera le signe de l'alliance entre moi et toi » (voir Livre IV, chap. XIV).
XII. -- C'est vêtir Dieu que de défendre la justice.
En chantant ce répons : « Induit me Dominus : Le Seigneur m'a revêtu1 », elle reçut cette lumière : Celui qui combat légitimement pour la justice, et travaille par ses paroles ou par ses actes à promouvoir la Religion, couvre le Seigneur d'un riche vêtement de gloire et de salut. Dans la vie éternelle, Dieu lui prodiguera les largesses de sa royale munificence et après l'avoir paré d'un vêtement d'allégresse, il le couronnera d'un diadème de gloire. Elle comprit encore que celui qui, dans ce combat soutenu pour le bien de la Religion, aura supporté des adversités et des contradictions deviendra plus agréable à Dieu comme le pauvre se montre doublement satisfait d'être habillé tout à la fois et réchauffé par un seul vêtement. Quand bien même, par suite de l'opposition des méchants, ce travail entrepris pour la gloire de Dieu n'amènerait aucun résultat, la récompense du fidèle serviteur ne serait en rien diminuée.
Au chant de ce répons : Vocavit angelus Domini 2 : l'ange du Seigneur appela, elle vit comment l'armée des anges, dont l'assistance suffirait à nous préserver de tout mal, suspend parfois sa protection efficace par ordre de la divine et paternelle Providence. Dieu permet alors que ses élus soient tentés, afin de les récompenser d'autant plus qu'ils ont triomphé par leur propre vertu, la garde des saints anges leur ayant été comme enlevée pendant quelques instants.
1. Répons du « Commun des Vierges » au bréviaire monastique.
2. Répons. V° du Bréviaire monastique au dimanche de la Quinquagésime, mais l'ordre des paroles est ici interverti.
XIII. -- Des biens que nous procurent l'obéissance et l'adversité.
A l'office du même jour, dans le répons qui suit immédiatement : Vocavit angelus Domini Abraham1 , elle comprit comment le Père des croyants mérita d'être appelé par un ange au moment où il étendait le bras pour accomplir les ordres du ciel. De même, si le juste, pour l'amour de Dieu; soumet son esprit et montre une bonne volonté parfaite en face d'une oeuvre difficile à accomplir, il mérite sur l'heure d'être soutenu par les douceurs de la grâce, et consolé par le bon témoignage de sa conscience. Par cette faveur l'infinie Bonté de Dieu devance le jour de la récompense éternelle, où chacun recevra selon ses oeuvres.
Elle pensait un jour à diverses souffrances supportées jadis, et demanda au Seigneur pourquoi il les avait permises. Le Seigneur répondit: « Quand la main d'un père veut corriger son enfant, la verge ne saurait lui résister. Aussi mes élus ne devraient jamais attribuer les maux qu'ils souffrent aux hommes : ils sont les instruments dont je me sers pour exercer leur patience. Mes amis devraient plutôt considérer mon paternel amour qui ne permettrait jamais au moindre souffle de les atteindre, s'il n'avait dessein de leur donner les joies éternelles après leurs souffrances. Que mes élus aient plutôt compassion des hommes qui, en les persécutant, souillent leurs propres âmes. »
1. Répons VI° dans le Bréviaire monastique.
XIV. -- Nos oeuvres offertes à Dieu le Père par son Fils lui sont très agréables.
Comme celle-ci éprouvait un jour de la difficulté pour un travail, elle dit au Père éternel : « Seigneur, je vous offre cette action par votre Fils unique, dans la vertu de votre Esprit-Saint, et pour votre éternelle gloire. » Elle comprit aussitôt que cette offrande donnait à son oeuvre une valeur extraordinaire et l'élevait au-dessus d'un acte simplement humain. Et comme les objets paraissent verts ou bleus si on les regarde à travers un verre de ces diverses couleurs, ainsi rien n'est plus agréable à Dieu le Père qu'une offrande faite par son Fils unique.
XV. -- Aucune prière fervente ne demeure sans fruit.
Elle demanda un jour au Seigneur à quoi servaient les prières fréquentes qu'elle lui adressait pour ses amis, puisqu'on n'en voyait pas les effets. II daigna l'éclairer par cette comparaison : « Lorsqu' un jeune prince revient du palais de l'empereur, après avoir reçu l'investiture d'un grand-fief et de richesses considérables, ceux qui le rencontrent ne voient pourtant en lui que la faiblesse de l'enfance sans soupçonner ce qui fera de cet enfant un puissant prince. Ne sois donc pas étonnée si tes yeux ne peuvent découvrir l'effet de tes prières : Mon éternelle sagesse en dispose pour un plus grand bien. Plus on prie pour une âme, plus on lui procure de bonheur. La prière persévérante ne demeure pas sans fruit, quoique les hommes ne puissent toujours apercevoir ici-bas la manière dont ils sont exaucés. »
XVI. -- Les saintes pensées, leur mérite et leur récompense.
Comme elle désirait savoir quelle récompense recevrait une âme qui aurait élevé toutes ses pensées vers Dieu, elle reçut cette instruction : « L'homme qui dirige ses pensées vers Dieu, soit en méditant, soit en priant, pose un miroir d'une transparence admirable, comme en face même du trône glorieux de la Divinité. Dans ce miroir le Seigneur contemple avec joie sa propre image, car c'est lui qui dirige et inspire tout ce qui est bien. Si, par suite de la fragilité humaine, l'homme éprouve des difficultés dans cet exercice de la prière, qu'il sache que plus le labeur sera rude, plus le miroir qu'il présentera en face de l'adorable Trinité et de tous les Saints sera clair et brillant ; de plus ce miroir resplendira éternellement pour la gloire de Dieu et l'allégresse sans fin de cette âme.
XVII -- Obstacles à la dévotion les jours de fête.
Un jour de solennité, un malencontreux mal de tête l'empêcha de chanter. Elle demanda au Seigneur pourquoi il permettait que ce malaise lui arrivât plus souvent aux jours de fête. Le Seigneur répondit: « De peur qu'entraînée par le charme des mélodies sacrées, tu ne deviennes moins apte aux touches de la grâce. » Elle objecta : « Mais votre grâce, ô mon Dieu, pourrait me garder de ce danger. - En effet, répondit le Seigneur, mais il y a avantage pour l'âme à ce que les occasions de chutes lui soient plutôt enlevées par l'épreuve et la souffrance, car elle obtient alors le double mérite de la patience et de l'humilité. »
XVIII. -- Effet de la bonne volonté.
Entraînée une fois par la ferveur de son amour, elle s'écria : « Combien je voudrais, ô mon Dieu, voir un feu ardent brûler mon âme et la rendre semblable à une substance liquide qui pourrait s'écouler facilement en vous ! » Le Seigneur répondit : « Ta volonté sera ce feu puissant. » Elle comprit alors que, par le seul mouvement de sa volonté, on peut obtenir le plein effet des désirs qui ont Dieu pour objet.
XIX. -- Bon résultat de la tentation.
Il lui arriva souvent de demander à Dieu de déraciner le vice en elle et dans les autres. Mais elle vit que la bonté divine ne pouvait mieux l'exaucer qu'en atténuant la fatale nécessité qui résulte des mauvaises habitudes. L'âme parvient alors à résister facilement au mal, car la difficulté cesse de s'accroître par l'habitude, appelée justement une seconde nature. Elle reconnut alors l'admirable conseil de la bonté divine pour le salut des hommes : afin d'augmenter la récompense éternelle des âmes, Dieu permet qu'elles soient fortement attaquées par l'aiguillon du péché. II ajoute ainsi à la gloire et à l'honneur de leur triomphe.
XX. -- Le Seigneur vient secourir dans leur agonie ceux qui ont pensé à lui.
Dans un sermon elle entendit cette parole : Pas un homme ne sera sauvé sans l'amour de Dieu, ou tout au moins cet amour devra être suffisant pour l'amener au repentir et à l'amendement de la vie. Elle se prit à réfléchir que beaucoup partaient de ce monde avec un repentir excité par la crainte de l'enfer plutôt que par l'amour de Dieu. Mais le Seigneur lui dit: « Quand je vois à l'agonie ceux qui ont quelquefois pensé à moi durant leur vie, ou bien ont accompli quelques oeuvres méritoires dans leurs derniers jours, je me montre alors à eux avec tant de bonté, de tendresse et d'amabilités, qu'ils se repentent sincèrement de m'avoir offensé, et c'est ce repentir qui les sauve. Aussi je voudrais que mes élus me glorifiassent et me rendissent des actions de grâces spéciales pour ce bienfait.
XXI. -- Dieu n'arrête pas ses regards sur les imperfections d'une âme qui l'aime véritablement.
En méditant, il lui arriva de considérer la misère de son âme et de concevoir un tel mépris d'elle-même, qu'elle se demanda, remplie d'anxiété, si elle pourrait jamais plaire à Dieu. En effet, où son oeil infirme ne voyait qu'une souillure, l'œil pénétrant de la divinité pouvait découvrir des taches innombrables. Le Seigneur lui donna cette consolante réponse: « C'est par l'amour que l'âme arrive à me plaire. » Elle comprit alors que si l'amour humain est assez impérieux pour faire attribuer des charmes à des êtres difformes, au point de rendre les amis presque jaloux de cette difformité qui a reçu le don de plaire, Dieu, qui est Charité, saura trouver de la beauté dans les créatures qu'il aime.
XXII. -- Comment le Seigneur tempéra dans l'âme de celle-ci le désir de la mort.
Elle souhaitait ardemment avec l'Apôtre être séparée de son corps pour s'unir à Jésus-Christ, et sous l'empire de ce désir, elle faisait entendre à Dieu les gémissements de son cœur. Le Seigneur daigna lui faire comprendre ce qui suit : chaque fois qu'elle exprimerait le désir d'être affranchie de cette prison de mort, tout en se montrant déterminée à demeurer ici-bas aussi longtemps qu'il plairait au Seigneur, autant de fois le Fils de Dieu lui communiquerait les mérites de sa très sainte vie, pour qu'elle devint parfaite au yeux de Dieu le Père.
XXIII. -- Dieu n'exige pas le fruit des oeuvres pour chacun de ses dons.
Elle se rappela un jour les grâces nombreuses et variées de la bonté divine à son égard, et se trouva misérable, indigne de tout bien, pour avoir perdu tant de dons par sa négligence : elle n'avait retiré de ces grâces aucun profit pour elle-même, par la jouissance ou l'action de grâces ; aucun profit pour le prochain qui ne les avait pas connues et n'avait pu s'en édifier ni s'élever par ce moyen à une plus grande connaissance de Dieu. Elle reçut alors cette lumière : le Seigneur, en répandant ses dons sur les hommes, n'exige pas un fruit spécial produit par chaque don, car il connaît la faiblesse de ses créatures ; mais Dieu ne pouvant contenir sa bonté et sa libéralité, répand sans cesse sur l'homme l'abondance de ses grâces pour le préparer à la surabondance de la félicité éternelle. C'est ce qui arrive à l'enfant auquel on remet des titres de propriété : il n'en voit pas l'utilité, mais, parvenu à l'âge d'homme, il jouira de tous ses biens. De même le Seigneur, en accordant dès ici-bas les grâces célestes à ses élus, leur donne déjà ces biens dont ils n'auront la pleine jouissance que dans les cieux.
XXIV. -- La volonté d'avoir de bons désirs supplée à leur absence.
Une fois son cœur souffrait de ne pas se sentir un désir assez grand de louer Dieu. Une lumière surnaturelle lui apprit que Dieu se contente de la volonté d'éprouver un grand désir si l'on ne peut faire davantage; dans ce cas le désir est aussi grand aux yeux de Dieu que les souhaits de l'âme. Quand le cœur contient un tel désir, c'est-à-dire la volonté d'avoir un désir, Dieu trouve plus de délices à habiter en lui que nous ne pouvons goûter de joie à la vue des fleurs qui naissent au printemps.
Une autre fois elle s'était relâchée pendant quelques jours dans son attention habituelle vers Dieu à cause de ses infirmités. Quand elle eut remarqué sa négligence, elle éprouva un grand regret et résolut de confesser sa faute au Seigneur avec une humble dévotion. Cependant elle craignait d'avoir à travailler longtemps pour retrouver les douceurs de la grâce céleste; mais à l'instant même elle sentit la bonté divine s'incliner vers elle et lui dire dans un embrassement plein d'amour : « Ma fille, tu es toujours avec moi, et tout ce qui est à moi est à toi 1. » Ces paroles lui firent comprendre que si l'homme, par suite de sa fragilité, néglige de diriger son intention vers Dieu, la tendre miséricorde du Seigneur ne laisse pas de juger toutes ses actions dignes d'une récompense éternelle, pourvu que la volonté ne se détourne pas de Dieu, et que l'on se repente fréquemment de ses fautes.
A l'approche d'une fête, elle se sentit envahie par la maladie, et pria le Seigneur de lui laisser la santé jusqu'après la solennité, ou de tempérer assez la douleur pour qu'elle pût célébrer la fête ; elle se soumettait néanmoins à la divine volonté. Le Seigneur daigna lui répondre : « Par cette prière et surtout par ton adhésion à ma volonté, tu m'introduis dans un jardin où je trouve mes délices au milieu d'admirables parterres émaillés de fleurs. Mais si je t'exauce en t'accordant de prendre part à la fêle, c'est moi qui te suivrai dans le parterre de ton choix ; tandis que si je n'accède pas à la demande et que tu persévères dans la patience, c'est toi qui me suivras dans le parterre de mes préférences. En effet, je prendrai bien plus mes délices en ton âme si j'y trouve les bons désirs, même un peu atténués par ton état de souffrance, que si tu ressens une grande dévotion jointe à ta propre satisfaction. »
(1) Allusion au texte de saint Luc, XV, 3l.
XXV. -- Il faut craindre que l'usage des sens nuise en nous à la grâce.
Celle-ci demanda un jour au Seigneur par quel secret jugement il faisait goûter à certaines âmes la douceur des consolations, tandis que d'autres demeuraient dans l'aridité. Elle reçut cette instruction : Le cœur de l'homme a été créé par Dieu pour contenir les délices spirituelles, comme le vase a été fait pour contenir l'eau. Si le vase plein d'eau la laisse échapper par quelques fissures, il arrivera peu à peu à se vider entièrement et demeurera sec. De même si le cœur qui renferme les délices spirituelles les perd par les sens extérieurs, soit en regardant ou écoutant ce qui lui plaît, soit en suivant ses convoitises, il peut arriver qu'il laisse évaporer pour ainsi dire ces douceurs célestes et demeure tellement vide qu'il devienne incapable de trouver sa joie en Dieu. C'est ce que chacun peut expérimenter par soi-même : Lorsqu'il plaît à l'homme de regarder quelque chose ou de dire une parole dont le profit sera nul ou presque nul, s'il suit aussitôt son mouvement naturel, c'est qu'il n'apprécie pas les divines délices : il les laisse donc s'échapper comme l'eau. Si au contraire il résiste, pour plaire à Dieu, à l'impulsion des attraits sensibles, aussitôt les délices spirituelles croissent en lui à tel point qu'il peut à peine les contenir. C'est pourquoi celui qui a appris à se vaincre en ces occasions prend l'habitude de se délecter en Dieu, et ses délices sont d'autant plus grandes, qu'il les a acquises au prix d'un plus rude labeur.
Elle ressentit un jour une tristesse profonde pour une chose de peu d'importance, et pendant que le prêtre présentait l'Hostie sainte à l'adoration du peuple, elle offrit sa désolation à Dieu, en louange éternelle. Le Seigneur parut alors l'attirer à lui par cette Hostie très sainte, comme par une ouverture mystérieuse. Il la fit doucement reposer sur son sein et lui dit avec bonté : « Dans ce lieu de repos tu seras exempte de toute peine ; mais chaque fois que tu t'en éloigneras, ton cœur éprouvera aussitôt cette profonde amertume qui te servira d'antidote salutaire et te ramènera vers ton Dieu.»
XXVI. -- Le Seigneur la console comme une mère console son petit enfant.
Un jour qu'elle sentait ses forces épuisées, elle dit au Seigneur : « Que deviendrai-je, ô mon Dieu ?. Que voulez-vous faire de moi? » Le Seigneur répondit : « Comme une mère console ses enfants, moi aussi je te consolerai. » Il ajouta : « As-tu vu quelquefois une mère consoler son petit enfant? » Elle se tut parce qu'elle n'avait pas ce souvenir présent à la mémoire. Le Seigneur lui rappela que, six mois auparavant, elle avait vu une mère caresser son petit enfant, et il lui fit remarquer trois choses qui n'avaient pas alors attiré son attention : Premièrement la mère demandait souvent à son petit enfant de l'embrasser, et ce petit être aux membres encore faibles et délicats, était obligé de faire effort pour s'élancer vers sa mère. Le Seigneur ajouta que l'âme devait aussi, avec un labeur continu et par le moyen de la contemplation s'élever à la très suave jouissance de l'objet de son amour. En second lieu, la mère mettait à l'épreuve la volonté de l'enfant en lui disant : « Veux-tu ceci ? Veux-tu cela ? » et ne lui accordait ni une chose ni l'autre. Dieu aussi tente l'homme en lui faisant appréhender de grandes afflictions qui ne surviennent jamais. Cependant, parce que la créature s'est soumise, Dieu se montre satisfait et la juge digne d'une récompense éternelle. Troisièmement, aucune des personnes présentes, si ce n'est la mère, ne comprenait le langage de cet enfant, trop petit encore pour formuler des mots. De même Dieu seul connaît l'intention de chacun et il juge d'après cette intention, à l'inverse des hommes qui souvent ne jugent que d'après les dehors.
Une fois, le souvenir de ses péchés la jeta dans une grande confusion. Elle chercha à se cacher dans l'abîme profond de son humilité, et le Seigneur de son côté s'inclina vers elle avec tant de condescendance, que la cour céleste, dont l'admiration égalait l'étonnement, s'efforçait de le retenir : « Non, je ne puis, dit le Seigneur, m'empêcher de suivre celle qui, par les attraits puissants de son humilité, attire invinciblement l'amour de mon divin Cœur. »
XXVII -- Estime de la patience.
Elle demanda un jour au Seigneur sur quel sujet il désirait qu'elle fixât son attention, et le Seigneur répondit : « Je désire que tu apprennes la patience. » Comme elle se trouvait alors, non sans motif, dans un grand trouble, elle répondit : « Comment et par quel moyen pourrai-je l'apprendre ? » Le Seigneur, la prenant dans ses bras comme un bon maître prend son jeune élève, lui enseigna par trois lettres les moyens qui devaient l'aider à pratiquer la patience. A la première lettre il lui dit : « Remarque combien le roi honore de son amitié celui qui partage ses triomphes et ses humiliations. Par conséquent, ma tendresse pour toi s'accroît lorsque tu souffres pour mon amour des mépris qui ressemblent à ceux que j'ai supportés. » A la deuxième lettre : « Admire quel respect tous les sujets témoignent à celui que le roi honore de son estime spéciale et associe à ses travaux ; comprends alors quelle gloire le ciel réserve à ta patience. » A la troisième lettre : « Songe enfin à quel point l'on peut être consolé par la tendre et délicate compassion d'un ami fidèle ; et tu pourras entrevoir avec quelle suave bonté je te consolerai dans les cieux, pour les moindres pensées qui t'affligent en cette vie. »
CHAPITRE XXXI.
PROCESSION AVEC L'IMAGE DE LA CROIX.
1. Au retour d'une procession qui avait été prescrite pour obtenir un temps favorable, comme le convent rentrait dans l'église précédé de l'image du Sauveur crucifié, elle comprit que le Fils de Dieu disait à son Père du haut de la croix : « Me voici, ô mon Père, revêtu de cette nature humaine que j'ai prise pour sauver la créature, et je viens, avec mon armée de fidèles, vous offrir des supplications. » Elle comprit que le Père céleste avait été aussi apaisé par ces paroles, que si on lui eût offert une satisfaction dépassant plus de cent fois tous les péchés des hommes. II lui sembla aussi que le Père éternel élevait la croix dans les airs en disant : « Hoc erit signum foederis inter me et terram : Ce sera le signe de l'alliance entre moi et la terre. » (Genèse, ix, 13.)
2. Une autre fois, le peuple était en grand émoi à cause du mauvais temps. Celle-ci et d'autres personnes ayant imploré la miséricorde de Dieu sans en rien obtenir, elle dit enfin au Seigneur : « O véritable Ami des hommes, comment pouvez-vous rester si longtemps sourd aux désirs de nos coeurs quand vous les comprenez? Malgré mon indignité, j'ai assez de confiance pour croire que j'aurais pu seule fléchir votre courroux, même au sujet de choses plus importantes. » Le Seigneur répondit : « Qu'y aurait-il d'étonnant à ce qu'un père laissât son fils lui demander fréquemment un écu, bien qu'il fût en son pouvoir de lui donner chaque fois cent marcs? Ne soyez donc pas surpris si je diffère en cette circonstance d'exaucer vos prières, car chaque fois que vous m'invoquez, par une courte parole ou la moindre pensée, je vous prépare dans l'éternité des biens qui surpassent infiniment la valeur de cent marcs. »
CHAPITRE XXXII
DU FRÉQUENT DÉSIR DU BIEN. -- DES RÊVES PÉNIBLES.
1. On chantait à la Messe des morts le trait : Sicut cervus 1, et à ces mots : Sitivit anima mea, celle-ci dit pour ranimer sa ferveur : « Vous êtes, ô mon Dieu, le seul vrai Bien, et mes désirs de vous posséder sont, hélas, si peu ardents ! Il est rare que je puisse dire en vérité : Sitivit anima mea ad te. » Le Seigneur répondit : « II n'est pas rare, mais très fréquent, que ton âme ait soif de moi ; car l'amour immense que j'ai du salut des hommes me force à croire que mes élus, en désirant certains biens, me désirent, moi, de qui procèdent tous les biens. Par exemple, si un homme souhaite avoir la santé, le repos, la sagesse et autres biens de même sorte, j'estime, afin d'augmenter ses mérites, que c'est moi qu'il a désiré en ces choses. Il n'y aurait d'exception que s'il s'éloignait volontairement de moi, c'est-à-dire s'il recherchait la sagesse pour en tirer vanité ou la santé pour commettre le péché. Le Seigneur ajouta : « J'ai coutume d'affliger mes bien-aimés par des infirmités corporelles, des peines spirituelles ou autres épreuves de ce genre, afin que s'ils en viennent à désirer les biens opposés à ces maux, l'amour jaloux de mon divin Cœur puisse les récompenser, selon les immenses richesses de ma libéralité infinie. »
2. Une inspiration divine lui fit encore comprendre que si le Seigneur, « cujus deliciae sunt esse cum filiis hominem, dont les délices sont d'être avec les fils des hommes » (Prov., VIII, 31), ne trouve rien dans une créature qui la rende digne de sa présence, il lui envoie diverses tribulations corporelles et spirituelles, afin d'avoir occasion de résider en celte âme. Il réalise alors ces paroles de la sainte Écriture : Le Seigneur est auprès de ceux qui ont le coeur dans la tribulation (Ps. XXVII, 19). Je suis avec lui dans la tribulation (Ps. XC, 16).
3. La considération de tels excès de bonté fait surabonder d'amour et de reconnaissance la créature humaine. Elle est forcée de s'écrier avec l'Apôtre : O profondeur des richesses de la sagesse et de la science de Dieu ! que ses jugements sont incompréhensibles et ses voies impénétrables! (Rom., XI, 33.)
4. Une nuit, pendant son sommeil, il lui sembla que le Seigneur la visitait avec tant de douceur, qu'elle se trouvait rassasiée par la divine présence comme par les mets les plus délicieux. S'éveillant bientôt, elle rendit grâces à Dieu: « Pourquoi, ô mon Seigneur, dit-elle, le temps du sommeil est-il rempli pour moi de douceurs, taudis que d'autres sont tourmentés par des rêves si effrayants, qu'ils épouvantent par leurs cris ceux qui les entendent ? » Le Seigneur répondit : « Lorsque les personnes que ma providence paternelle a résolu de sanctifier par la souffrance recherchent, pendant le jour, tout ce qui peut satisfaire leur corps, et perdent ainsi des occasions de mérites, ma bonté divine leur envoie des peines pendant le sommeil, afin de leur donner quelque droit à la récompense. - Mais, ô mon Dieu, dit-elle, peuvent-elles donc retirer un mérite quelconque de ce qu'elles souffrent sans puissance d'acquiescement et presque contre leur volonté? - Oui, répondit lé Seigneur, ma bonté le permet ainsi. Les séculiers qui portent de l'or et des pierreries sont estimés riches. Quelques-uns portent des perles de verre et des bijoux de cuivre, et ils ont aussi l'air d'être riches. C'est ce qui se passe pour ces personnes. »
5. Elle apportait une fois moins de zèle et de soin à la récitation des heures canoniales, lorsqu'elle aperçut, à son côté, l'antique ennemi du genre humain qui s'efforçait de l'imiter par dérision, et achevait le psaume : Mirabilia testimonia tua, etc. (Ps. CXVIII, 12) en précipitant et en supprimant les syllabes et les mots. Après avoir terminé le verset, il lui dit : « Vraiment ton Créateur, ton Sauveur, l'Ami de ton âme a bien placé ses dons en t'accordant une si grande facilité d'élocution ! Ta bouche a le talent de prononcer d'admirables discours sur n'importe quel sujet ; mais lorsque tu t'adresses à Dieu, tes paroles sortent avec une telle précipitation, que, dans un seul psaume, tu as omis tant de lettres, tant de syllabes et tant de mots ! » Elle comprit alors que si cet ennemi rusé avait compté si exactement et par le menu, les lettres et les syllabes omises dans la psalmodie, il pourrait, au moment de la mort, porter une terrible accusation contre ceux qui réciteraient habituellement les heures avec négligence et précipitation.
6. Une autre fois, comme elle filait avec activité, il lui arriva de laisser échapper de petits fils de laine ; toute son attention, d'ailleurs, était tournée vers le Seigneur, à qui elle avait offert son travail. Elle vit bientôt le démon ramasser tous ces menus fils pour témoigner contre elle ou l'accusant de négligence. Mais le Seigneur invoqué chassa l'ennemi et lui reprocha d'avoir eu l'audace d'intervenir dans une oeuvre qui avait été offerte à Dieu.
1. Ce trait (comme un cerf altéré, mon âme a soif de toi), attribué maintenant à I'office du samedi saint, se disait en divers lieux, au moyen âge, à la messe des défunts.