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Blog Parousie de Patrick ROBLES (Puget-Théniers, Alpes-Maritimes - FRANCE)

Sermons du Saint Curé d'Ars 25

Saint Père Matteo d'Agnone

Nous voyons que la miséricorde du Père ne peut pas aller plus loin, puisque, n'ayant qu'un fils, il le sacrifie pour nous sauver, ce Fils, qui est tout ce qu'il a de plus cher. Mais si nous considérons l'amour du Fils, qu'en dirons-nous ? Il consent si volontairement à souffrir tant de tourments, et la mort même, pour nous procurer le bonheur du ciel ! Hélas ! M.F., que n'a-t-il pas fait pour nous pendant les jours de sa vie mortelle ? Non content de nous appeler à lui par sa grâce, et de nous fournir tous les moyens pour nous sanctifier, voyez comment il court après ses brebis égarées ; voyez comment il parcourt les villes et les campagnes pour les chercher, et les ramener dans le lieu de sa misé-ricorde ; voyez comment il quitte ses Apôtres pour aller attendre la Samaritaine auprès du puits de Jacob, où il savait qu'elle viendrait ; il la prévient lui-même, il commence à lui parler, afin que son langage plein de douceur, uni à sa grâce, la touche et la console ; il lui demande de l'eau à boire, afin qu'elle-même lui demande quelque chose de bien plus précieux, qui est sa grâce. Il fut si content d'avoir gagné cette âme que lorsque ses Apôtres le prièrent de prendre de la nourriture : « Oh ! non, leur dit-il. » Il semblait leur dire : « Ah ! non, non, je ne pense pas à la nourriture du corps, tant j'ai de joie d'avoir gagné une âme à mon Père ! »
Voyez-le dans la maison de Simon le lépreux ; ce n'est pas pour y manger qu'il y va ; mais il savait qu'il y viendrait une Madeleine pécheresse : voilà, M.F., ce qui le conduit dans ce festin. Considérez la joie qu'il montre sur son visage en voyant Madeleine à ses pieds, qui les arrose de ses larmes et qui les essuie de ses cheveux, pendant tout le temps du repas. Mais le Sau-veur, de son côté, la paie bien de retour ; il vide à pleines mains sa grâce dans son cœur. Voyez comme il prend sa défense contre ceux qui s'en scandalisent . Il va si loin, que non content de lui pardonner tous ses péchés, en chassant les sept démons qu'elle avait dans son cœur, il veut encore la choisir pour une de ses épouses ; il veut qu'elle l'accompagne dans tout le cours de sa passion et que, « dans le monde où cet Évangile sera prêché, l'on raconte ce qu'elle vient de faire à son égard » ; il ne veut pas parler de ses péchés, parce qu'ils sont déjà tous pardonnés par l'application de son sang adorable, qu'il doit répandre.
Voyez-le prendre la route de Capharnaüm pour aller trouver un autre pécheur dans son bureau : c'était saint Matthieu : c'est pour en faire un zélé apôtre . Deman-dez-lui pourquoi il prend la route de Jéricho, il vous dira : qu'il y a un homme nommé Zachée, qui passe pour un pécheur public, et, qu'il veut aller voir s'il pourra le sauver. Afin d'en faire un parfait pénitent, il fait comme un bon père qui a perdu son enfant, il l'appelle : « Zachée, lui crie-t-il, descendez ; car c'est chez vous que je veux aller loger aujourd'hui, je viens vous accorder votre grâce. » C'est comme s'il lui disait Zachée, quittez cet orgueil et cet attachement aux biens de ce monde ; descendez, c'est-à-dire, choisissez l'humi-lité et la pauvreté. Pour bien le faire comprendre, il dit à tout ceux qui étaient avec lui : « Cette maison reçoit aujourd'hui le salut ». - O mon Dieu ! que votre miséricorde est grande pour les pécheurs !
Demandez-lui encore pourquoi il a passé dans cette place publique. « Ah ! vous dira-t-il, c'est que j'attends cette femme adultère que l'on doit amener pour la faire lapider ; et moi, je vais prendre sa défense contre ses ennemis, la toucher et la convertir. » Voyez-vous ce tendre Sauveur auprès de cette femme, comment il se comporte, comment il prend sa défense ? La voyant tout environnée de cette populace qui n'attendait que le signal pour l'assommer, le Sauveur semble leur dire : « Un moment, laissez-moi agir, ensuite vous agirez à votre tour. » Il s'abaisse sur la terre, il écrit, non sa sentence de condamnation, mais d'absolution. S'étant relevé, il les regarde. Ne semble-t-il pas leur dire : « Maintenant que cette femme est pardonnée, elle n'est plus une pécheresse, mais une sainte pénitente : quel est celui d'entre vous qui est égal à elle ? Si vous êtes sans péché, jetez-lui la première pierre. » Tous ces fameux hypocrites, voyant que Jésus-Christ lisait dans leur conscience, les plus vieux, qui sans doute étaient les plus coupables, se retirèrent les premiers, et ainsi des autres. Jésus-Christ, la voyant seule, lui dit avec bonté : « Femme, qui sont ceux qui vous ont con-damnée ? » comme s'il lui avait dit : Après que je vous ai pardonnée, qui serait celui qui aurait osé vous con-damner ? « Ah ! Seigneur, lui répondit cette pécheresse, personne. - Eh bien ! allez, et ne péchez plus . »
Voyez encore ce qu'il éprouve en voyant cette femme qui, depuis douze ans, avait une perte de sang. Elle se jette humblement à ses pieds ; « car, disait-elle, si je peux seulement toucher le bord de son manteau, je suis sûre d'être guérie ». Jésus-Christ se tournant, d'un air de bonté dit : « Qui est-ce qui me touche ? Allez, mon enfant, lui dit-il, ayez confiance, vous êtes guérie dans l'âme et dans le corps ». Voyez-le, comme il prend compassion du chagrin de ce père qui lui présente son fils, possédé du démon dès son enfance ...
Voyez-le pleurer en approchant de la ville de Jérusa-lem, qui était la figure des pécheurs qui ne veulent plus se laisser toucher le cœur. Voyez comment il verse des larmes sur sa perte éternelle. « Oh ! combien de fois, ingrate Jérusalem, n'ai-je pas voulu te ramener dans le sein de ma miséricorde, comme une poule rassemble ses petits sous ses ailes ; mais tu n'as pas voulu. O ingrate Jérusalem ! qui as tué les prophètes et fait mourir les ser-viteurs de Dieu ! oh ! si, du moins, tu voulais encore aujourd'hui recevoir ta grâce que je viens t'appor-ter ! » Voyez-vous, M.F., comment le bon Dieu pleure la perte de nos âmes quand il voit que nous ne voulons pas nous convertir ?
D'après tout ce que nous voyons que Jésus-Christ a fait pour nous sauver, comment pourrions-nous déses-pérer de sa miséricorde, puisque son plus grand plaisir est de nous pardonner ; de sorte que, quelque multipliés que soient nos péchés, si nous voulons les quitter et nous en repentir, nous sommes sûrs de notre pardon. Quand nos fautes égaleraient les feuilles des forêts, nous serons pardonnés, si notre cœur est vraiment contrit. Pour vous en convaincre, en voici un bel exemple. Nous lisons dans l'histoire qu'un jeune homme, nommé Théophile, qui était prêtre, fut accusé auprès de son évêque, et déposé d'une dignité dont il était pourvu. Cet affront le porta à une telle fureur, qu'il appela le démon à son secours. Cet esprit malin lui apparut sous une forme ordinaire, lui promettant de lui faire recouvrir sa dignité s'il voulait renoncer de suite à Jésus et à Marie. Il le fit, étant aveuglé par la fureur, et donna au démon une renonciation par un écrit fait de sa main. Le jour suivant, l'évêque ayant reconnu sa faute, le fit appeler dans l'église, lui demanda pardon d'avoir cru trop facilement ce que l'on avait dit de lui, et le rétablit dans sa dignité. Sur cela le prêtre se trouva dans un grand embarras ; il demeura longtemps déchiré par les remords de sa cons-cience. Il lui vint en pensée d'avoir recours à la sainte Vierge, voyant qu'il était si indigne de demander lui--même pardon au bon Dieu. Il alla donc devant une image de la sainte Vierge, la priant de lui obtenir son pardon auprès de son divin Fils ; et, pour cela, il jeûna quarante jours et pria continuellement. Au bout de qua-rante jours, la sainte Vierge lui apparut, lui disant qu'elle avait obtenu son pardon. II fut bien consolé de cette grâce ; mais il lui restait encore une épine bien profonde à tirer : c'était ce billet qu'il avait donné au démon. Il pensa que le bon Dieu ne refuserait pas cette grâce à sa Mère ; il continua trois jours à la prier, et, à son réveil, il trouva son billet sur sa poitrine. Plein de reconnaissance, il va à l'église, et, devant tout le monde, il publie la grâce que le bon Dieu lui avait accordée par l'entremise de sa sainte Mère. Faisons de même : si nous nous trouvons trop coupables pour demander pardon au bon Dieu, adressons-nous à la sainte Vierge et nous sommes sûrs de notre pardon.
Mais, pour vous engager à avoir une grande confiance en la miséricorde de Dieu qui est infinie, en voici un exemple que nous donne l'Évangile et qui nous montre que la miséricorde de Dieu est infinie : c'est celui de l'enfant prodigue, qui, après avoir demandé à son père tout le bien qui pouvait lui revenir, alla dans un pays étranger. Il y dissipa tout son bien en vivant comme un libertin et un débauché. Sa mauvaise conduite le rédui-sit à une telle misère qu'il se trouvait trop heureux d'avoir les restes des pourceaux, encore ne lui en don-nait-on pas autant qu'il en voulait. Réfléchissant un jour sur la grandeur de sa misère, il disait à son maître chez qui il était pour garder les pourceaux : « Donnez-moi au moins de ce que mangent les plus sales animaux. » Quelle misère, M.F., est comparable à celle-là ? Cepen-dant personne ne lui en donnait. Se voyant contraint de mourir de faim, et vivement touché de son malheureux état, il ouvre les yeux et se rappelle qu'il avait un si bon père qui l'aimait tant. Il prend la résolution de re-tourner dans la maison paternelle, où les plus simples valets avaient du pain plus qu'il ne leur en fallait. II se disait à lui-même : « J'ai bien mal fait d'avoir abandonné mon père qui m'aimait tant ; j'ai dissipé tout mon bien en menant une mauvaise vie ; je suis tout déchiré et tout sale, comment est-ce que mon père pourra me reconnaître pour son fils ? Mais je me jetterai à ses pieds, je les arroserai de mes larmes ; je lui demanderai de me mettre seulement au nombre de ses serviteurs. » Le voilà qui se lève et qui part, tout occupé de l'état malheureux où son libertinage l'avait réduit. Son père, qui pleurait depuis bien longtemps sa perte, le voyant venir de loin, oublia son grand âge et la mauvaise vie de ce fils, il se jeta à son cou pour l'embrasser. Ce pauvre enfant, tout étonné de l'amour de son père pour lui : « Ah ! mon père, s'écrie-t-il, j'ai péché contre vous et contre le ciel ! je ne mérite plus d'être appelé votre fils, mettez-moi seulement au nombre de vos servi-teurs. - Non, non, mon fils, s'écrie le père tout plein de joie d'avoir le bonheur de retrouver son fils qu'il croyait perdu ; non, mon fils, tout est oublié, ne pensons plus qu'à nous réjouir. Qu'on lui apporte sa première robe pour l'en revêtir, qu'on lui mette un anneau au doigt et des souliers aux pieds ; qu'on tue le veau gras et qu'on se réjouisse ; car mon fils était mort et il est ressuscité, il était perdu et il est retrouvé . »
Belle figure, M.F., de la grandeur de la miséricorde de Dieu pour les pécheurs les plus misérables ! En effet, dès que nous avons le malheur de pécher, nous nous éloignons de Dieu, et nous nous réduisons, en suivant nos passions, à un état plus misérable que celui des pourceaux qui sont les plus sales animaux. O mon Dieu ! que le péché est quelque chose d'affreux ! comment peut-on le commettre ? Mais tout misérables que nous sommes, dès que nous prenons la résolution de nous convertir, à la première preuve de conversion, les entrailles de sa miséricorde sont touchées de compas-sion. Ce tendre Sauveur court, par sa grâce, au-devant des pécheurs, il les embrasse en les favorisant des con-solations les plus délicieuses. En effet, jamais un pécheur n'éprouve plus de plaisir que dans le moment où il quitte le péché pour se donner au bon Dieu ; il lui sem-ble que rien ne pourra l'arrêter ; ni prière, ni péni-tence : rien ne lui parait trop dur. O moment délicieux ! que nous serions heureux si nous avions le bonheur de le comprendre ! Mais, hélas ! nous ne correspondons pas à la grâce, et alors, ces heureux moments dispa-raissent. Jésus-Christ dit au pécheur par la bouche de ses ministres : « Que l'on revête ce chrétien qui est converti, de sa première robe qui est la grâce du bap-tême qu'il a perdue ; qu'on le revête de Jésus-Christ, de sa justice, de ses vertus et de tous ses mérites. » Voilà, M.F., la manière dont Jésus-Christ nous traite quand nous avons le bonheur de quitter le péché pour nous donner à lui. Ah ! M.F., quel sujet de confiance pour un pécheur, quoique bien coupable, de savoir que la miséricorde de Dieu est infinie !

II. - Non, M.F., ce n'est pas la grandeur de nos péchés, ni leur nombre, qui doivent nous effrayer ; mais seulement les dispositions que nous devons avoir. Tenez, M.F., voici un autre exemple qui va vous mon-trer que, comme que nous soyons coupables, nous som-mes sûrs de notre pardon, si nous voulons le demander au bon Dieu. Nous lisons dans l'histoire qu'un grand prince, dans sa dernière maladie, fut attaqué d'une ten-tation terrible de méfiance en la bonté et la miséricorde de Dieu. Le prêtre qui l'assistait dans ce moment, voyant qu'il perdait confiance, faisait tout ce qu'il pouvait pour lui en inspirer, en lui disant que jamais le bon Dieu n'a refusé le pardon à celui qui le lui a demandé. « Non, non, dit le malade, il n'y a plus de pardon pour moi, j'ai trop fait de mal. » Le prêtre voyant qu'il n'y avait plus de ressources, se mit en prière. Dans ce moment, le bon Dieu lui mit à la bouche ces paroles que le saint Roi-Prophète prononça avant de mourir : « Prince, lui dit-il, écoutez le prophète pénitent ; vous êtes pécheur comme lui, dites sincèrement avec lui : Seigneur, vous aurez pitié de moi, parce que mes péchés sont bien grands, et c'est précisément la gran-deur de mes péchés qui sera le motif qui vous engagera à me pardonner. » A ces paroles, le prince revenant comme d'un profond sommeil, s'arrête un moment tout transporté de joie, et poussant un profond soupir : « Ah ! Seigneur, c'est bien pour moi que ces paroles ont été prononcées ! Oui, mon Dieu, c'est précisément parce que j'ai fait bien du mal que vous aurez pitié de moi ! » Il se confesse et reçoit tous ses sacrements en versant des torrents de larmes ; il fait avec joie le sacrifice de sa vie, et meurt ayant entre les mains son crucifix qu'il arrose de ses larmes. En effet, M.F., qu'est-ce que nos péchés, si nous les comparons à la miséricorde de Dieu ? C'est une graine de navette devant une montagne. O mon Dieu ! comment peut-on consentir à être damné, puisqu'il en coûte si peu pour se sauver et que Jésus-Christ désire tant notre salut ?...
Cependant, M.F., si le bon Dieu est si bon de nous attendre et de nous recevoir, il ne faut pas lasser sa patience : s'il nous appelle, s'il nous invite à venir à lui, il faut aller à sa rencontre ; s'il nous reçoit, il faut lui rester fidèle. Hélas ! M.F., il y a peut-être plus de cinq à six ans que le bon Dieu nous appelle ; pourquoi res-tons-nous dans nos péchés ? Il est toujours présent pour nous offrir notre grâce, pourquoi ne pas quitter le péché ? En effet, M.F., saint Ambroise nous dit : « Le bon Dieu, tout bon et tout miséricordieux qu'il est, jamais il ne nous pardonne, si nous ne lui deman-dons pardon, si nous n'unissons pas notre volonté à celle de Jésus-Christ. »
Mais quelle volonté, M.F., est-ce que Dieu demande de nous ? La voici. C'est une volonté qui corresponde aux saints empressements de sa miséricorde, qui nous fasse dire comme à saint Paul : « Vous avez entendu dire quelles ont été ma conduite et mes actions avant que Dieu ne m'eût fait la grâce de me convertir. Je per-sécutais l'Église de Jésus-Christ avec tant de cruauté, que j'en ai horreur moi-même toutes les fois que j'y pense. Qui aurait pu croire que ce fût ce moment que Jésus-Christ avait choisi pour m'appeler à lui ? Ce fut dans ce moment que je fus tout environné d'une lumière ; j'entendis une voix qui me dit : « Saul, Saul, pourquoi me persécutes-tu ? » Hélas ! M.F., com-bien de fois le bon Dieu ne nous a-t-il pas fait la même grâce ? Combien de fois dans le péché, ou prêts à pécher, n'avons-nous pas entendu une voix intérieure qui nous criait : « Ah ! mon fils, pourquoi veux-tu me faire souffrir et perdre ton âme ? » En voici un bel exemple.
Nous lisons dans l'histoire qu'un enfant dans sa colère tua son père. Il en conçut un si grand regret qu'il lui semblait continuellement entendre une voix qui lui criait : « Ah ! mon fils, pourquoi m'as-tu tué ? » Ce qui lui fut si sensible, qu'il alla lui-même se dénoncer à la justice. Non seulement, M.F., nous devons quitter le péché parce que le bon Dieu est si bon que de nous pardonner ; mais nous devons encore pleurer de recon-naissance. Nous en avons un bel exemple dans la per-sonne du jeune Tobie conduit et ramené par l'ange , ce qui nous montre combien on plaît à Dieu quand on le remercie. Nous lisons dans l'Évangile que cette femme qui, depuis douze ans, était atteinte d'une perte de sang, ayant été guérie par Jésus-Christ, en reconnais-sance, afin de montrer à tout le monde la bonté de Dieu à son égard, fit placer près de sa maison une belle statue représentant une femme auprès de Jésus-Christ, qui l'avait guérie. Plusieurs auteurs nous disent qu'il y venait une herbe inconnue à tout le monde, et que dès qu'elle montait jusqu'à la frange de la robe de la statue, elle guérissait toutes sortes de maladies. Voyez saint Mathieu : afin de remercier Jésus-Christ de la grâce qu'il lui avait faite, il l'invita chez lui et lui fit tous les honneurs qu'il pouvait lui faire . Voyez le lépreux samaritain : se voyant guéri, il retourne sur ses pas, se jette aux pieds de Jésus-Christ pour le remercier de la grâce qu'il venait de lui faire .
Saint Augustin nous dit que la principale action de grâces, c'est que votre âme soit sincèrement reconnais-sante envers la bonté de Dieu, en se donnant tout à lui avec toutes ses affections. Voyez le Sauveur, quand il eut guéri les dix lépreux, voyant qu'il n'y en avait qu'un qui revenait le remercier : « Et les neuf autres, lui dit Jésus-Christ, n'ont-ils pas aussi été guéris ? » comme s'il leur avait dit : Pourquoi est-ce que les autres ne viennent pas me remercier ? Saint Bernard nous dit qu'il faut être très reconnaissants envers le bon Dieu, parce que cela l'engage à nous accorder beaucoup d'autres grâces. Hélas ! M.F., que de grâces n'avons-nous pas à rendre à Dieu de nous avoir créés, de nous avoir rachetés par sa mort et passion, de nous avoir fait naître dans le sein de son Église, tandis que tant d'autres vivent et meurent hors de son sein. Oui, M.F., puisque la bonté et la miséricorde de Dieu sont infinies, tâchons donc d'en bien profiter, et, par là, nous aurons le bonheur de lui plaire, et de conserver nos âmes dans sa grâce : ce qui nous procurera le bonheur d'aller jouir de sa sainte présence avec tous les bienheureux dans le ciel. C'est ce que je vous souhaite.

3ème dimanche après la Pentecôte

(DEUXIEME SERMON)

Sur la miséricorde de Dieu envers le Pécheur.

Erant autem appropinquantes ei publicani et peccatores ; ut audirent illum.
Les publicains et les pécheurs se tenaient auprès de Jésus-Christ pour l'écouter.
(S.Luc., XV, 1.)

Qui pourrait comprendre la grandeur de la miséricorde du Seigneur envers ces pécheurs ? Sa grâce va les cher-cher au milieu de leurs désordres, les amène à ses pieds. Il se rend leur protecteur contre les Scribes et les Pha-risiens qui ne peuvent les souffrir, et il justifie sa con-duite à leur égard par la parabole d'un bon pasteur qui, de cent brebis, en ayant perdu une, abandonne tout son troupeau pour aller chercher celle qui s'égare, et, l'ayant trouvée, la charge sur ses épaules, la ramène au bercail, où il n'est pas plus tôt arrivé, qu'il invite ses amis à ve-nir partager avec lui sa joie d'avoir retrouvé la brebis qu'il croyait perdue. Il joint à cette parabole celle d'une femme qui, de dix drachmes en ayant égaré une, allume sa lampe pour la chercher dans le lieu le plus obscur de sa maison, et qui, l'ayant enfin recouvrée, té-moigne la même joie que le bon pasteur d'avoir retrouvé sa brebis égarée. Le Sauveur du monde, se faisant à lui--même l'application de ces vives images de sa miséri-corde pour les pécheurs, dit que tout le ciel se réjouira de la sorte pour un pécheur qui se convertira et fera pénitence. Si notre conversion cause tant de joie à toute la cour céleste, hâtons-nous de nous convertir. Quelque coupable que nous soyons, quelque déréglée que soit notre vie, allons sincèrement à Dieu, et nous sommes sûrs de notre pardon. Pour vous y engager, je vous montrerai combien est grande la miséricorde de Dieu envers les pécheurs, et ensuite ce que le pécheur doit faire pour y correspondre.

I. - Tout est engageant et consolant dans la conduite que la miséricorde de Dieu tient à l'égard des pécheurs : elle les attend, elle les invite et les reçoit à la péni-tence. « Dieu, nous dit le prophète Isaïe, attend le pécheur, et cela, par un pur effet de sa bonté, car le pécheur, aussitôt qu'il est tombé en faute, mérite d'être puni. » Rien n'est plus dû au péché que le châtiment. Dès que ce misérable pécheur s'est révolté contre son Dieu, toutes les créatures demandent vengeance de sa révolte. Seigneur, lui disent-elles, comme les serviteurs du père de famille, permettez que nous allions arracher du champ de votre Église cette ivraie qui gâte et désho-nore le bon grain. Voulez-vous, lui dit la mer, que je l'engloutisse dans mes abîmes ? La terre : que je m'en-tr'ouvre pour le faire descendre tout vivant dans les enfers ? L'air : que je le suffoque ? Le feu : que je le brûle ? L'eau : que je le noie ? Mais que répond le Père des miséricordes ? Non, non, dit-il, cette ivraie peut devenir un bon grain ; ce pécheur peut se convertir. Que ce pécheur s'égare, il ne dit mot. Qu'il s'éloigne de lui, qu'il coure à sa perte, il le soutire. « O Seigneur ! ô Dieu des miséricordes ! encore pécheur je m'éloignais tous les jours de plus en plus, dit saint Augustin ; tous mes pas et toutes mes démarches étaient autant de chutes dans de nouveaux précipices, mes passions s'allumaient tou-jours davantage ; cependant vous y aviez patience. O patience infinie de mon Dieu ! il y a tant d'années que je vous offense, et vous ne m'avez pas encore puni ! D'où vient donc cela ? Ah ! je le connais maintenant ; c'est que vous vouliez que je me convertisse et que je retour-nasse à vous par la pénitence. »

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