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  • : In hoc signo vinces. Parousie by ROBLES Patrick
  • : Blog Parousie de Patrick ROBLES (Montbéliard, Franche-Comté, France)
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  • Patrick ROBLES
  • Dominus pascit me, et nihil mihi deerit. Le Seigneur est mon berger : je ne manquerai de rien. The Lord is my shepherd; I shall not want. El Señor es mi pastor, nada me falta. L'Eterno è il mio pastore, nulla mi mancherà. O Senhor é o meu pastor; de nada terei falta. Der Herr ist mein Hirte; mir wird nichts mangeln. Господь - Пастырь мой; я ни в чем не буду нуждаться. اللهُ راعِيَّ، فلَنْ يَنقُصَنِي شَيءٌ (Ps 23,1)
  • Dominus pascit me, et nihil mihi deerit. Le Seigneur est mon berger : je ne manquerai de rien. The Lord is my shepherd; I shall not want. El Señor es mi pastor, nada me falta. L'Eterno è il mio pastore, nulla mi mancherà. O Senhor é o meu pastor; de nada terei falta. Der Herr ist mein Hirte; mir wird nichts mangeln. Господь - Пастырь мой; я ни в чем не буду нуждаться. اللهُ راعِيَّ، فلَنْ يَنقُصَنِي شَيءٌ (Ps 23,1)

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31 mai 2008 6 31 /05 /mai /2008 15:14
Léonie, soeur de Thérèse
Soeur Françoise-Thérèse (1863-1941)

J'espérais que Papa allait parler mais il me dit d'expliquer moi-même à Monseigneur le but de notre visite ; je le fis le plus éloquemment possible, sa Grandeur habituée à l'éloquence ne parut pas très touchée de mes raisons, au lieu d'elles un mot de Monsieur le Supérieur m'eût plus servi, malheureusement je n'en avais pas et son opposition ne plaidait aucunement en ma faveur.. . Monseigneur me demanda s'il y avait longtemps que je désirais entrer au carmel : " Oh oui ! Monseigneur, bien longtemps... " " Voyons, reprit en riant Mr Révérony, vous ne pouvez toujours pas dire qu'il y a quinze ans que vous avez ce désir. " " C'est vrai, repris-je en souriant aussi, mais il n'y a pas beaucoup d'années à retrancher car j'ai désiré me faire religieuse dès l'éveil de ma raison et j'ai désiré le carmel aussitôt que je l'ai bien connu, parce que dans cet ordre je trouvais que toutes les aspirations de mon âme seraient remplies. " Je ne sais pas, ma Mère, si ce sont tout à fait mes paroles, je crois que c'était encore plus mal tourné, mais enfin c'est le sens. Monseigneur croyant être agréable à Papa essaya de me faire rester encore quelques années auprès de lui, aussi ne fut-il pas peu surpris et édifié de le voir prendre mon parti, intercédant pour que j'obtienne la permission de m'envoler à quinze ans. Cependant tout fut inutile, il dit qu'avant de se décider un entretien avec le Supérieur du Carmel était indispensable. Je ne pouvais rien entendre qui me fît plus de peine, car je connaissais l'opposition formelle de notre Père, aussi sans tenir compte de la recommandation de Monsieur Révérony je fis plus que montrer des diamants à Monseigneur, je lui en donnai !... Je vis bien qu'il était touché ; me prenant par le cou, il appuyait ma tête sur son épaule et me faisait des caresses, comme jamais, paraît-il, personne n'en

Manuscrit A Folio 55 Recto.

avait reçu de lui. Il me dit que tout n'était pas perdu, qu'il était bien content que je fasse le voyage de Rome afin d'affermir ma vocation et qu'au lieu de pleurer je devais me réjouir ; il ajouta que la semaine suivante, devant aller à Lisieux, il parlerait de noi à Monsieur le curé de Saint Jacques et que certainement je recevrais sa réponse en Italie. Je compris qu'il était inutile de faire de nouvelles instances, d'ailleurs je n'avais plus rien à dire ayant épuisé toutes les ressources de mon éloquence. Monseigneur nous reconduisit jusqu'au jardin. Papa l'amusa beaucoup en lui disant qu'afin de paraître plus âgée, je m'étais fait relever les cheveux. (Ceci ne fut pas perdu car Monseigneur ne parle pas de " sa petite fille " sans raconter l'histoire des cheveux...) Monsieur Révérony voulut nous accompagner jusqu'au bout du jardin de l'évêché, il dit à Papa que jamais chose pareille ne s'était vue : " Un père aussi empressé de donner son enfant au Bon Dieu que cette enfant de s'offrir elle-même ! " Papa lui demanda plusieurs explications sur le pèlerinage, entre autres comment il fallait s'habiller pour paraître devant le St Père. Je le vois encore se tourner devant Monsieur Révérony en lui disant : " Suis-je assez bien comme cela ? " Il avait aussi dit à Monseigneur que s'il ne me permettait pas d'entrer au Carmel je demanderais cette grâce au Souverain Pontife. Il était bien simple dans ses paroles et ses manières mon Roi chéri, mais il était si beau... il avait une distinction toute naturelle qui dut plaire beaucoup à Monseigneur habitué à se voir entouré de personnages connaissant toutes les règles de l'étiquette des salons mais pas le Roi de France et de Navarre en personne avec sa petite reine... Quand je fus dans la rue mes larmes recommencèrent à couler, non pas tant à cause de mon chagrin, qu'en voyant mon petit Père chéri qui venait de faire un voyage inutile... Lui qui se faisait une fête d'envoyer une dépêche au Carmel, annonçant l'heureuse réponse de Monseigneur, était obligé de

Manuscrit A Folio 55 Verso.

revenir sans en avoir aucune... Ah ! que j'avais de peine !... Il me semblait que mon avenir était brisé pour jamais ; plus j'approchais du terme, plus je voyais mes affaires s'embrouiller. Mon âme était plongée dans l'amertume, mais aussi dans la paix car je ne cherchais que la volonté du Bon Dieu. Aussitôt en arrivant à Lisieux, j'allai chercher de la consolation au Carmel et j'en trouvai près de vous, ma Mère chérie. Oh non ! jamais je n'oublierai tout ce que vous avez souffert à cause de moi. Si je ne craignais de les profaner en m'en servant, je pourrais dire les paroles que Jésus adressait à ses apôtres, le soir de sa Passion : " C'est vous qui avez été toujours avec moi dans toutes mes épreuves... " (NHA 537) (Lc 22,28) Mes bien-aimées soeurs m'offrirent aussi de bien donces consolations... Trois jours après le voyage de Bayeux, je devais en faire un beaucoup plus long, celui de la ville éternelle... (NHA 601) Ab ! quel voyage que celui-là !... Lui seul m'a plus instruite que de longues années d'études, il m'a montré la vanité de tout ce qui passe et que tout est affliction d'esprit sous le soleil... (NHA 602) (Qo 2,11) Cependant j'ai vu de bien belles choses, j'ai contemplé toutes les merveilles de l'art et de la religion, surtout j'ai foulé la même terre que les Saints Apôtres, la terre arrosée du sang des Martyrs et mon âme s'est agrandie au contact des choses saintes... Je suis bien heureuse d'avoit été à Rome, mais je comprends les personnes du monde qui pensèrent que Papa m'avait fait faire ce grand voyage afin de changer mes idées de vie religieuse ; il y avait en effet de quoi ébranler une vocation peu affermie. N'ayant jamais vécu parmi le grand monde, Céline et moi, nous nous trouvâmes au milieu de la noblesse qui composait presque exclusivement le pèlerinage. Ah ! bien loin de nous éblouir, tous ces titres et ces " de " ne nous parurent qu'une fumée... De loin cela m'avait quelquefois jeté un peu de poudre aux yeux, mais de près, j'ai vu que " tout ce qui brille n'est pas or " et j'ai compris cette parole

Manuscrit A Folio 56 Recto.

de l'Imitation : " Ne poursuivez pas cette ombre qu'on appelle un grand nom, ne désirez ni de nombreuses liaisons ni l'amitié particulière d'aucun homme. " (NHA 603) J'ai compris que la vraie grandeur se trouve dans l'âme et pas dans le nom, puisque, comme le dit Isaïe : " Le Seigneur donnera un AUTRE NOM à ses élus. " (Is 65,15) (NHA 604) et St Jean dit aussi : " Que le vainqueur recevra un NOM NOUVEAU que nul ne connaît que celui qui le reçoit. " (Ap 2,17) (NHA 605) C'est donc au ciel que nous saurons quels sont nos titres de noblesse. Alors chacun recevra de Dieu la louange qu'il mérite (1Co 4,3) (NHA 606) et celui qui sur la terre aura voulu être le plus pauvre, le plus oublié pour l'amour de Jésus, celui-là sera le premier, le plus noble et le plus riche !... La seconde expérience que j'ai faite regarde les prêtres. N'ayant jamais vécu dans leur intimité, je ne pouvais comprendre le but principal de la réforme du Carmel. Prier pour les pécheurs me ravissait, mais prier pour les âmes des prêtres, que je croyais plus pures que le cristal, +251 me semblait étonnant !... Ah ! j'ai compris ma vocation en Italie, ce n'était pas aller chercher trop loin une si utile connaissance... Penchant un mois j'ai vécu avec beaucoup de saints prêtres et j'ai vu que, si leur sublime dignité les élève au-dessus des anges, ils n'en sont pas moins des hommes faibles et fragiles... Si de saints prêtres que Jésus appelle dans son Evangile : " Le sel de la terre " montrent dans leur conduite qu'ils ont un extrême besoin de prières, que faut-il dire de ceux qui sont tièdes ? Jésus n'a-t-Il pas dit encore : " Si le sel vient à s'affadir avec quoi l'assaisonnera-t-on ? " (NHA 607) O ma Mère ! qu'elle est belle la vocation ayant pour but de conserver le sel destiné aux âmes ! Cette vocation est celle du Carmel, puisque l'unique fin de nos prières et de nos sacrifices est d'être l'apôtre des apôtres, (Mt 5,13) priant pour eux pendant qu'ils évangélisent les âmes par leurs paroles et surtout par leurs exemples...

Manuscrit A Folio 56 Verso.

Il faut que je m'arrête, si je continuais de parler sur ce sujet, je ne finirais pas !... Je vais, ma Mère chérie, vous raconter mon voyage avec quelques détails ; pardonnez-moi si je vous en donne trop, je ne réfléchis pas avant d'écrire, et je le fais en tant de fois différentes, à cause de mon peu de temps libre, que mon récit vous paraîtra peut-être ennuyeux... Ce qui me console c'est de penser qu'au Ciel je vous reparlerai des grâces que j'ai reçues et que je pourrai le faire alors en termes agréables et charmants... Plus rien ne viendra interrompre nos épanchements intimes et dans un seul regard, vous aurez tout compris... Hélas, puisqu'il me faut encore employer le langage de la triste terre, je vais essayer de le faire avec la simplicité d'un petit enfant qui connaît l'amour de sa Mère... Ce fut le 7 novembre que le pèlerinage partit de Paris, mais Papa nous conduisit dans cette ville quelques jours avant pour nous la faire visiter. Un matin à trois heures, je traversai la ville de Lisieux encore endormie ; bien des impressions passèrent dans mon âme à ce moment. Je sentais que j'allais vers l'inconnu et que de grandes choses m'attendaient là-bas... Papa était joyeux ; lorsque le train se mit en marche, il chanta ce vieux refrain : " Roule, roule ma diligence, nous voilà sur le grand chemin. " Arrivés à Paris dans la matinée, nous commençames aussitôt à le visiter. Ce pauvre petit Père se fatigua beaucoup afin de nous faire plaisir, aussi nous eûmes bientôt vu toutes les merveilles de la capitale. Pour moi je n'en trouvai qu'une seule qui me ravit, cette merveille fut : " Notre-Dame des Victoires " Ah ! ce que j'ai senti à ses pieds, je ne pourrais le dire... Les grâces qu'elle m'accorda m'émurent si profondément que mes larmes seules traduisirent mon bonheur, comme au jour de ma première communion... La Sainte Vierge m'a fait sentir que c'était vraiment elle qui m'avait souri et qui m'avait guérie. J'ai compris qu'elle veillait sur moi, que j'étais son enfant, aussi je ne pouvais plus lui donner que

Manuscrit A Folio 57 Recto.

le nom de " Maman " car il me semblait encore plus tendre que celui de Mère... Avec quelle ferveur ne l'ai-je pas priée de me garder toujours et de réaliser bientôt mon rêve en me cachant à l'ombre de son manteau virginal !... Ah ! c'était là un de mes premiers désirs d'enfant... En grandissant, j'avais compris que c'était au Carmel qu'il me serait possible de trouver véritablement le manteau de la Sainte Vierge et c'était vers cette montagne fertile que tendaient mes désirs... Je suppliai encore Notre-Dame des Victoires d'éloigner de moi tout ce qui aurait pu ternir ma pureté ; je n'ignorais pas qu'en un voyage comme celui d'Italie, il se rencontrerait bien des choses capables de me troubler, surtout parce que ne connaissant pas le mal je craignais de le découvrir, n'ayant pas expérimenté que tout est pur pour les purs (NHA 609) (Tt 1,15) et que l'âme simple et droite ne voit de mal à rien, puisqu'en effet le mal n'existe que dans les coeurs impurs et non dans les objets insensibles... Je priai aussi Saint Joseph de veiller sur moi ; depuis mon enfance j'avais pour lui une dévotion qui se confondait avec mon amour pour la Sainte Vierge. Chaque jour je récitais la prière : " O Saint Joseph, père et protecteur des vierges " aussi ce fut sans crainte que j'entrepris mon lointain voyage, j'étais si bien protégée qu'il me semblait impossible d'avoir peur. Apres nous être consacrées au Sacré Coeur dans la basilique de Montmartre nous partîmes de Paris le lundi 7 dès le matin ; (NHA 610) bientôt nous eûmes fait connaissance avec les personnes du pèlerinage. Moi si timide qu'ordinairement j'osais à peine parler, je me trouvai complètement débarrassée de ce gênant défaut ; à ma grande surprise je parlais librement avec toutes les grandes dames, les prêtres et même Monseigneur de Coutances. Il me semblait avoir toujours vécu dans ce monde. Nous étions, je crois,

Manuscrit A Folio 57 Verso.

bien aimées de tout le monde et Papa semblait fier de ses deux filles ; (NHA 611) mais s'il était fier de nous, nous l'étions également de lui, car il n'y avait pas dans tout le pèlerinage un monsieur plus beau ni plus distingué que mon Roi chéri ; il aimait à se voir entouré de Céline et de moi, souvent lorsque nous n'étions pas en voiture et que je n'éloignais de lui, il m'appelait afin que je lui donne Ie bras comme à Lisieux... Monsieur l'abbé Révérony examinait soigneusement toutes nos actions, je le voyais souvent de loin qui nous regardait ; à table lorsque je n'étais pas en face de lui, il trouvait moyen de se pencher pour me voir et entendre ce que je disais. Sans doute il voulait me connaître pour savoir si vraiment j'étais capable d'être carmélite ; je pense qu'il a dû être satisfait de son examen car à la fin du voyage il parut bien disposé pour moi, mais à Rome il a été loin de m'être favorable comme je vais le dire plus loin. Avant d'arriver à cette " ville éternelle, " but de notre pèlerinage, il nous fut donné de contempler bien des merveiiles. D'abord ce fut la Suisse avec ses montagnes dont le sommet se perd dans les nuages, ses cascades gracieuses jaillissant de mille manières différentes, ses vallées profondes remplies de fougères gigantesques et de bruyères roses. Ah ! ma Mère chérie, que ces beautés de la nature répandues à profusion ont fait de bien à mon âme ! Comme elles l'ont élevée vers Celui qui s'est plu à jeter de pareils chefs-d'oeuvre sur une terre d'exil qui ne doit durer qu'un jour... Je n'avais pas assez d'yeux pour regarder. Debout à ia portière je perdais presque la respiration ; j'aurais voulu être des deux côtés du wagon car en me détournant, je voyais des paysages d'un aspect enchanteur et tout différents de ceux qui s'étendaient devant moi. Parfois nous nous trouvions au sommet d'une montagne, à nos pieds des

Manuscrit A Folio 58 Recto.

précipices dont le regard ne pouvait sonder la profondeur semblaient prêts à nous engloutir... ou bien c'était un ravissant petit village avec ses gracieux chalets et son clocher, au-dessus duquel se balançaient mollement quelques nuages éclatants de blancheur... Plus loin c'était un vaste lac que doraient les derniers rayons du soleil ; les flots calmes et purs empruntant la teinte azurée du Ciel qui se mêlait aux feux du couchant, présentaient à nos regards émerveillés le spectacle le plus poétique et le plus enchanteur qui se puisse voir... Au fond du vaste horizon on apercevait les montagnes dont les contours indécis auraient échappé à nos yeux si leurs sommets neigeux que le soleil rendait éblouissants n'étaient venus ajouter un charme de plus au beau lac qui nous ravissait... En regardant toutes ces beautés, il naissait en mon âme des pensées bien profondes. Il me semblait comprendre déjà la grandeur de Dieu et les merveilles du Ciel... La vie religieuse m'apparaissait telle qu'elle est avec ses assujettissements, ses petits sacrifices accomplis dans l'ombre. Je comprenais combien il est facile de se replier sur soi-même, d'oublier le but sublime de sa vocation et je me disais : plus tard, à l'heure de l'épreuve, lorsque prisonnière au Carmel, je ne pourrai contempler qu'un petit coin du Ciel étoilé, je me souviendrai de ce que je vois aujourd'hui ; cette pensée me donnera du courage, j'oublierai facilement mes pauvres petits intérêts en voyant la grandeur et la puissance du Dieu que je veux aimer uniquement. Je n'aurai pas le malheur de m'attacher à des pailles, maintenant que " Mon COEUR a PRESSENTI ce que Jésus réserve à ceux qui l'aiment !... " (NHA 612) (1Co 2,9) Après avoir admiré la puissance du Bon Dieu, je pus encore admirer celle qu'Il a donnée à ses créatures. La première ville d'Italie que nous avons visitée fut Milan. Sa cathédrale toute en marbre blanc, avec ses statues assez nombreuses pour former un peuple presque innombrable,

Manuscrit A Folio 58 Verso.

fut visitée par nous dans ses plus petits détails. Céline et moi nous étions intrépides, toujours les premières et suivant immédiatement Monseigneur ; afin de tout voir en ce qui concernait les reliques des Saints et bien entendre les explications ; ainsi pendant qu'il offrait le Saint Sacrifice sur le tombeau de Saint Charles, nous étions avec papa derrière l'Autel, la tête appuyée sur la châsse qui renferme le corps du saint, revêtu de ses habits pontificaux. C'était ainsi partout... (Excepté lorsqu'il s'agissait de monter là où la dignité d'un Evêque ne le permettait pas car alors nous savions bien quitter sa Grandeur)... Laissant les dames timides se cacher la figure dans les mains après avoir gravi les premiers clochetons qui couronnent la cathédrale, nous suivions les pèlerins les plus hardis et arrivions jusqu'au sommet du dernier clocher de marbre, d'où nous avions le plaisir de voir à nos pieds la ville de Milan dont les nombreux habitants ressemblaient à une petite fourmilière... Descendues de notre piédestal, nous commençâmes nos promenades en voiture qui devaient durer un mois, et me rassasier pour toujours de mon désir de rouler sans fatigue ! Le campo santo nous ravit encore plus que la cathédrale, toutes ses statues de marbre blanc qu'un ciseau de génie semble avoir animées, sont placées sur le vaste champ des morts avec une sorte de négligence, ce qui pour moi augmente leur charme... On serait tenté de consoler les idéals personnages qui vous entourent. Leur expression est si vraie, leur douleur si calme et si résignée qu'on ne peut s'empêcher de reconnaître les pensées d'immortalité qui doivent remplir le coeur des artistes exécutant ces chefs-d'oeuvre. Ici c'est une enfant jetant des fleurs sur la tombe de ses parents, le marbre semble avoir perdu sa pesanteur et les pétales délicats semblent glisser entre les doigts de l'enfant, le vent paraît déjà les disperser,

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il paraît aussi faire flotter le voile léger des veuves et les rubans dont sont ornés les cheveux des jeunes filles. Papa était aussi ravi que nous ; en Suisse il avait été fatigué mais alors, sa gaîté ayant reparu, il jouissait du beau spectacle que nous contemplions ; son âme d'artiste se révélait dans les expressions de foi et d'admiration qui paraissaient sur son beau visage. Un vieux monsieur (français) qui sans doute n'avait pas l'âme aussi poétique, nous regardait du coin de l'oeil et disait avec mauvaise humeur, tout en ayant l'air de regretter ne pas pouvoir partager notre admiration : " Ah ! que les Français sont donc enthousiastes ! " Je crois que ce pauvre monsieur aurait mieux fait de rester chez lui, car il ne m'a pas paru être content de son voyage, il se trouvait souvent près de nous et toujours des plaintes sortaient de sa bouche, il était mécontent des voitures, des hôtels, des personnes, des villes, enfin de tout... Papa avec sa grandeur d'âme habituelle essayait de le consoler, lui offrait sa place, etc... et il se trouvait toujours bien partout, étant d'un caractère directement opposé à celui de son désobligeant voisin... Ah ! que nous avons vu de personnages différents, quelle intéressante étude que celle du monde quand on est près de le quitter ! ... A Venise, la scène changea complètement ; au lieu du bruit des grandes villes on n'entend au milieu du silence que les cris des gondoliers et le murmure de l'onde agitée par les rames. Venise n'est pas sans charmes, mais je trouve cette ville triste. Le palais des doges est splendide, cependant il est triste lui aussi avec ses vastes appartements où s'étalent l'or, le bois, les marbres les plus précieux et les peintures des plus grands maîtres. Depuis longtemps ses voûtes sonores ont cessé d'entendre la voix des gouverneurs qui prononçaient des arrêts de vie et de mort dans les salles que nous avons traversées... Ils ont cessé de souffrir, les malheureux prisonniers renfermés par les doges dans les cachots et les

Manuscrit A Folio 59 Verso.

oubliettes souterraines... En visitant ces affreuses prisons je me croyais au temps des martyrs et j'aurais voulu pouvoir y rester afin de les imiter !... Mais il fallut promptement en sortir et passer sur le pont " des soupirs ", ainsi appelé à cause des soupirs de soulagement que poussaient les condamnés en se voyant délivrés de l'horreur des souterrains auxquels ils préféraient la mort... Après Venise, nous sommes allés à Padoue, où nous avons vénéré la langue de Saint Antoine puis à Bologne où nous avons vu Sainte Catherine qui garde l'empreinte du baiser de l'Enfant Jésus. Il est bien des détails intéressants que je pourrais donner sur chaque ville et sur les mille petites circonstances particulières de notre voyage mais je n'en finirais pas, aussi je ne vais écrire que les détails principaux. Ce fut avec joie que je quittai Bologne, cette ville m'était devenue insupportable par les étudiants dont elle est remplie et qui formaient une haie quand nous avions le malheur de sortir à pied, et surtout à cause de la petite aventure qui m'est arrivée avec l'un d'eux, (NHA 613) je fus heureuse de prendre la route de Lorette. Je ne suis pas surprise que la Ste Vierge ait choisi cet endroit pour y transporter sa maison bénie, la paix, la joie, la pauvreté y règnent en souveraines ; tout est simple et primitif, les femmes ont conservé leur gracieux costume italien et n'ont pas, comme celles des autres villes, adopté la mode de Paris ; enfin Lorette m'a charmée ! Que dirai-je de la sainte maison ? Ah ! mon émotion a été profonde en me trouvant sous le même toit que la Sainte Famille, en contemplant les murs sur lesquels Jésus avait fixé ses yeux divins, en foulant la terre que Saint Joseph avait arrosée de sueurs, où Marie avait porté Jésus entre ses bras, après l'avoir porté dans son sein virginal... J'ai vu la petite chambre où l'ange descendit auprès de la Sainte Vierge... J'ai déposé mon chapelet dans la petite écuelle de l'Enfant Jésus... Que ces souvenirs sont ravissants !...

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Mais notre plus grande consolation fut de recevoir Jésus Lui-même dans sa maison et d'être son temple vivant (1Co 3,16) au lieu même qu'il avait honoré de sa présence. Suivant un usage d'Italie, le Saint ciboire ne se conserve dans chaque église que sur un autel, et là seulement on peut recevoir la Sainte communion ; cet autel était dans la basilique même où se trouve la Sainte maison, renfermée comme un diamant précieux dans un écrin de marbre blanc. Cela ne fit pas notre bonheur ! C'était dans le diamant lui-même et non pas dans l'écrin que nous voulions faire la communion... Papa avec sa douceur ordinaire fit comme tout le monde, mais Céline et moi allâmes trouver un prêtre qui nous accompagnait partout et qui justement se préparait à célébrer sa messe dans la Santa-Casa, par un privilège spécial. Il demanda deux petites hosties qu'il plaça sur sa patène avec sa grande hostie et vous comprenez, ma Mère chérie, quel fut notre ravissement de faire toutes les deux la Sainte communion dans cette maison bénie !. .. C'était un bonheur tout céleste que les paroles sont impuissantes à traduire. Que sera-ce donc quand nous recevrons la communion dans l'éternelle demeure du Roi des Cieux ? Alors nous ne verrons plus finir notre joie, il n'y aura plus la tristesse du départ et pour emporter un souvenir il ne nous sera pas nécessaire de gratter furtivement les murs sanctifiés par la présence Divine, puisque sa maison sera la nôtre pour l'éternité... Il ne veut pas nous donner celle de la terre, il se contente de nous la montrer pour nous faire aimer la pauvreté et la vie cachée ; celle qu'il nous réserve est son Palais de gloire où nous ne le verrons plus caché sous l'apparence d'un enfant ou d'une blanche hostie mais tel qu'Il est, dans l'éclat de sa splendeur infinie !... (1Jn 3,2) C'est maintenant de Rome qu'il me reste à parler, de Rome but de

Manuscrit A Folio 60 Verso.

notre voyage, là où je croyais rencontrer la consolation mais où je trouvai la croix... A notre arrivée, il faisait nuit et nous étant endormies nous fûmes réveillées par les employés de la gare qui criaient : " Roma, Roma. " Ce n'était pas un rêve, j'étais à Rome !... (NHA 614) La première journée se passa hors les murs et ce fut peut-être la plus délicieuse, car tous les monuments ont conservé leur cachet d'antiquité au lieu qu'au centre de Rome l'on pourrait se croire à Paris en voyant la magnificence des hôtels et des magasins. Cette promenade dans les campagnes romaines m'a laissé un bien doux souvenir. Je ne parlerai point des lieux que nous avons visités, il y a assez de livres qui les décrivent dans toute leur étendue, mais seulement des principales impressions que j'ai ressenties. Une des plus douces fut celle qui me fit tressaillir à la vue du Colisée. Je la voyais donc enfin cette arène où tant de martyrs avaient versé leur sang pour Jésus ; déjà je m'apprêtais à baiser la terre qu'ils avaient sanctifiée, mais quelle déception ! le centre n'est qu'un amas de décombres que les pèlerins doivent se contenter de regarder car une barrière en défend l'entrée, d'ailleurs personne n'est tenté d'essayer de pénétrer au milieu de ces ruines... Fallait-il être venue à Rome sans descendre au Colisée ?... Cela me paraissait impossible, je n'écoutais plus les explications du guide, une seule pensée m'occupait : descendre dans l'arène... voyant un ouvrier qui passait avec une échelle je fus sur le point de la lui demander, heureusement je ne mis pas mon idée à exécution car il m'aurait prise pour une folle...

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