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  • : In hoc signo vinces. Parousie by ROBLES Patrick
  • : Blog Parousie de Patrick ROBLES (Montbéliard, Franche-Comté, France)
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  • Dominus pascit me, et nihil mihi deerit. Le Seigneur est mon berger : je ne manquerai de rien. The Lord is my shepherd; I shall not want. El Señor es mi pastor, nada me falta. L'Eterno è il mio pastore, nulla mi mancherà. O Senhor é o meu pastor; de nada terei falta. Der Herr ist mein Hirte; mir wird nichts mangeln. Господь - Пастырь мой; я ни в чем не буду нуждаться. اللهُ راعِيَّ، فلَنْ يَنقُصَنِي شَيءٌ (Ps 23,1)
  • Dominus pascit me, et nihil mihi deerit. Le Seigneur est mon berger : je ne manquerai de rien. The Lord is my shepherd; I shall not want. El Señor es mi pastor, nada me falta. L'Eterno è il mio pastore, nulla mi mancherà. O Senhor é o meu pastor; de nada terei falta. Der Herr ist mein Hirte; mir wird nichts mangeln. Господь - Пастырь мой; я ни в чем не буду нуждаться. اللهُ راعِيَّ، فلَنْ يَنقُصَنِي شَيءٌ (Ps 23,1)

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19 juillet 2008 6 19 /07 /juillet /2008 14:11
DEUXIÈMES DEMEURES

CHAPITRE UNIQUE

De la valeur de la persévérance, pour atteindre aux dernières Demeures, du vif combat que livre le démon, et combien il est utile de ne pas se tromper de chemin au début. D'un moyen dont elle a fait l'expérience efficace.

1 Venons-en maintenant à parler des âmes qui pénètrent dans les deuxièmes Demeures, et de ce qu'elles y font. Je voudrais le faire brièvement, car je m'en suis occupée bien longuement ailleurs (Autobiographie, chap. 11-13 ; Le Chemin de la Perfection, chap.20-29), il me serait impossible de ne pas me répéter, je ne me rappelle rien de ce que j'ai dit ; si je pouvais cuisiner cela de différentes façons, je sais bien que vous n'en seriez pas fâchées, puisque nous ne nous lassons jamais des livres qui traitent de ces sujets, si nombreux soient-ils.

2 Il s'agit de ceux qui ont déjà commencé à faire oraison et compris l'importances pour eux, de ne pas en rester aux premières Demeures ; mais, souvent, ils ne sont pas encore assez déterminés à ne pas y rester, ils ne s'éloignent pas encore des occasions, ce qui est fort dangereux. Dieu leur fait une bien grande miséricorde lorsqu'ils cherchent par instants à fuir les couleuvres et choses venimeuses, et comprennent qu'il est bon de les fuir. Ceux-là, pour une part, peinent beaucoup plus que les premiers, mais ils sont beaucoup moins exposés ; ils semblent connaître le danger, et il y a grand espoir de les voir pénétrer plus avant. Je dis qu'ils peinent plus, parce que les premiers sont comme des muets qui entendraient rien ; ils supportent donc mieux l'épreuve de ne pas parler que ceux qui entendraient sans pouvoir parler : ce serait bien plus pénible. Mais on n'en désire pas pour autant ne pas entendre, car, enfin, c'est une grande chose que de comprendre ce qu'on nous dit. Donc, ceux-là entendent les appels du Seigneur ; ils se rapprochent du séjour de Sa Majesté, il est trés bon voisin, et sa miséricorde et sa bonté sont si grandes que même au milieu de nos passe-temps, de nos affaires, de nos plaisirs et des voleries du monde, même lorsque nous tombons dans le péché, et nous en relevons, (ces bêtes sont si venimeuses, leur compagnie est si dangereuse et si tapageuse qu'il serait merveilleux de ne trébucher ni tomber), ce Seigneur, malgré tout, apprécie tellement que nous l'aimions et recherchions sa compagnie qu'il ne manque pas, un Jour ou l'autre, de nous appeler, pour nous inviter à nous approcher de Lui ; et cette voix est si douce que la pauvre âme se consume de ne pouvoir faire immédiatement ce qu'il lui ordonne ; c'est pourquoi, comme je l'ai dit, elle est bien plus en peine que si elle ne l'entendait point.

3 Je ne dis pas que cette voix et ces appels ressemblent à ceux dont je parlerai plus loin ; s'il s'agit de paroles de gens de bien, de sermons, de ce qu'on lit dans de bons livres, de beaucoup de choses que vous avez entendues, et qui sont un appel de Dieu, également des maladies, des épreuves, des vérités aussi qu'il nous enseigne dans ces moments que nous consacrons à l'oraison ; si paresseusement que vous vous y adonniez, Dieu prise cela très haut. Et vous, mes soeurs, ne méprisez point cette première faveur, sans toutefois vous désoler lorsque vous ne répondez pas immédiatement au Seigneur, Sa Majesté sait bien attendre de longs jours, des années, en particulier quand elle voit en nous de bons désirs, étude la persévérance. C'est ce qu'il y a de plus nécessaire ici ; avec la persévérance, on ne manque jamais de beaucoup gagner. Mais la batterie que fomentent sous mille formes les démons est terrible, et bien plus pénible à l'âme que dans la demeure antérieure ; là-bas, elle était muette et sourde, du moins elle n'entendait guère et résistait moins, comme ceux qui ont perdu en partie l'espérance de vaincre. Ici l'entendement est plus vif, les puissances plus habiles ; les coups et la canonnade sont tels que l'âme ne peut manquer de les entendre. Les démons proposent ces couleuvres que sont les choses du monde, ils présentent, comme éternelles, en quelque sorte, ses joies, l'estime dans laquelle il nous tient, les amis et parents, la santé par rapport aux choses de la pénitent (car toujours, l'âme qui entre dans cette demeure, se met à souhaiter de se mortifier un peu), et mille autres sortes d'obstacles.

4 Ô Jésus ! quel train mènent ici les démons, quelle affliction est celle de la pauvre âme qui ne sait si elle doit avancer ou retourner à la première Demeure ! Car la raison, d'autre part, lui montre qu'elle se leurre beaucoup si elle s'imagine que tout cela n'est rien, comparé avec ce qu'elle recherche. La foi l'instruit de ce qui lui est réservé. La mémoire lui représente à quoi aboutit tout cela, elle lui rappelle la mort de ceux qui ont beaucoup joui de ces choses qu'elle a vues, dont quelques-uns, morts subitement, sont bientôt oubliés de tous ; elle a vu fouler aux pieds Ceux quelle avait connus en pleine prospérité, elle est passée elle-même sur leur sépulture, elle a songé que dans ce corps grouillaient beaucoup de vers, et tant d'autres choses que la mémoire peut lui rappeler. La volonté est portée à aimer, lorsqu'elle a vu tant de marques d'amour et de choses innombrables, elle voudrait les payer de retour ; en particulier, il lui apparaît que ce véritable amant ne la quitte jamais, il l'accompagne, il lui donne la vie et l'être. Aussitôt, l'entendement accourt lui faire entendre qu'elle ne peut se faire un meilleur ami, quand elle vivrait bien des années ; que le monde entier est plein de fausseté ; et ses plaisirs (ceux que lui procure le démon), pleins de peines, de soucis, et de contrariétés ; il lui dit qu'elle est certaine de ne trouver ni sécurité, ni paix hors de ce château ; qu'elle cesse donc d'aller dans des maisons étrangères puisque la sienne regorge de biens, si elle veut en jouir ; qui donc pourrait trouver comme elle tout ce dont elle a besoin dans sa maison, en particulier un pareil hôte, si elle ne veut pas se perdre comme l'enfant prodigue, et manger la nourriture des porcs.

5 Ce sont là des raisons pour vaincre les détenons. Mais, ô Seigneur et mon Dieu ! Les habitudes de la vanité, où tout le monde est engagé, corrompent toutes choses ! La foi est si morte que nous préférons ce que nous voyons à ce qu'elle nous dit ; à la vérité, nous ne voyons pourtant qu'infortunes chez ceux qui poursuivent ces choses visibles. C'est le fait de ces choses venimeuses dont nous avons parlé ; comme celui que mord une vipère est tout entier empoisonné, enflé, il en est de même ici-bas, et nous ne nous en préservons pas. Évidemment, de nombreux traitements seront nécessaires pour guérir, et c'est déjà une fort grande faveur de Dieu que de n'en pas mourir. Vrai, l'âme souffre ici de grandes peines, en particulier si le démon comprend que son caractère et ses habitudes la prédisposent à aller très loin ; alors, tout l'enfer se conjuguera pour l'obliger à s'en retourner et à sortir du château.

6 Ah, mon Seigneur ! Ici votre aide est nécessaire, sans elle on ne peut rien. Par votre miséricorde, ne permettez pas que cette âme soit dupée, et incitée à abandonner ce qu'elle a commencé. Éclairez-la, pour qu'elle voie que tout son bonheur en dépend, et qu'elle évite les mauvaises compagnies. Car c'est une chose immense que de fréquenter ceux qui parlent de tout cela, de rechercher, non seulement ceux qu'elle rencontre dans les mêmes salles qu'elle, mais ceux dont elle comprend qu'ils ont pénétré plus avant ; ils l'aideront beaucoup, et ces conversations peuvent les inciter à l'admettre en leur compagnie. Songez toujours à ne pas vous laisser vaincre, car si le démon vous voit bien déterminé à perdre la vie, le repos, tout ce qu'il vous offre, plutôt que de retourner à la première salle, il vous lâchera beaucoup plus vite. Soyez un homme, et pas de ceux qui se jetaient à plat ventre pour boire quand ils allaient au combat, je ne me rappelle plus avec qui (Gédéon), mais montrez votre résolution, vous allez vous battre contre tous les démons, et il n'est meilleures armes que celles de la croix.

7 Ce qui va suivre est si important que, bien que je l'aie déjà dit d'autres fois (Autobiographie, chap. 11), je le répète ici. Voici : ne vous dites point qu'il y a des joies dans ce que vous entreprenez, ce serait une façon bien basse de commencer à bâtir un si vaste et si précieux édifice, et si vous fondez sur le sable, tout croulera : vous n'en finirez pas d'être mécontents et tentés. Car ce n'est pas dans ces Demeures que pleut la manne, mais plus loin, là où tout a la saveur de ce qu'aime l'âme, parce qu'elle ne veut que ce que Dieu veut. C'est du joli ! Nous sommes encore en proie à mille difficultés et imperfections, les vertus ne savent pas encore marcher, à peine commencent-elles à naître, et plaise même à Dieu qu'elles aient commencé, et nous n'avons pas honte de vouloir des douceurs dans l'oraison et te nous plaindre de nos sécheresses ! Que cela ne vous arrive jamais, mes soeurs ; embrassez la croix que votre Époux a portée, et comprenez que ce sont là vos hauts faits ; que la plus apte à souffrir souffre pour Lui davantage, et elle sera la mieux préservée. Le reste n'est qu'accessoire ; si le Seigneur vous l'accorde, remerciez-le bien.

8 Vous vous croirez bien décidées à affronter les peines extérieures, à condition que Dieu vous dorlote intérieurement. Sa Majesté sait mieux que nous ce qui nous convient ; nous n'avons pas à lui conseiller ce qu'Elle doit nous donner, elle peut nous dire avec raison que nous ne savons pas ce que nous demandons (Mt 20,22). Quiconque débute dans l'oraison (n'oubliez pas cela, c'est très important), doit avoir l'unique prétention de peiner, de se déterminer, de se disposer, aussi diligemment que possible, à conformer sa volonté à celle de Dieu ; et comme je le dirai plus loin, soyez bien certaines que telle est la plus grande perfection qu'on puisse atteindre dans la voie spirituelle. Vous recevrez d'autant plus du Seigneur que vous observerez cela plus parfaitement, et vous avancerez d'autant mieux sur cette voie. Ne croyez pas qu'il y ait là des complications arabes, des choses ignorées et secrètes : tout notre bonheur consiste en cela. Mais si nous nous trompons au début, si nous voulons immédiatement que le Seigneur fasse notre volonté, qu'il nous conduise comme nous l'imaginons, quelle peut être la solidité de l'édifices ? Tâchons de faire ce qui dépend de nous, et gardons-nous de cette vermine venimeuse ; le Seigneur veut souvent que de mauvaises pensées nous poursuivent et nous affligent sans que Nous parvenions à les chasser, il permet les sécheresses, il consent même parfois à ce que nous soyons mordus pour mieux savoir nous garder à l'avenir, et mettre à l'épreuve notre profond regret de l'avoir offensé.

9 S'il vous arrive de tomber, ne vous découragez pas, ne renoncez pas à vous efforcer d'avancer, Dieu tirera du bien de cette chute même, comme celui qui vend la thériaque commence par boire du poison, pour s'assurer de sa bonne qualité. Quand cela ne suffirait qu'à nous montrer notre misère, le grand tort que nous fait l'éparpillement où nous vivons, nos luttes, dans cette batterie, pour retrouver le recueillement, ce serait beaucoup. Est-il plus grand malheur que de ne pas nous retrouver nous-même dans notre propre maison ? Quel espoir de trouver le repos dans d'autres maisons, si nous ne pouvons nous reposer chez nous ? Car nos grands, nos vrais amis et parents, ceux avec lesquels, même malgré nous, nous devons vivre toujours, c'est-à-dire nos puissances, semblent nous faire la guerre, comme si elles nous gardaient rancune de celle que nos vices leur ont faite. La paix, la paix, mes soeurs, a dit bien souvent le Seigneur, en admonestant ses disciples (Jn 10,21). Croyez-moi donc : si nous ne la possédons pas, si nous ne la recherchons pas dans notre maison nous ne la trouverons pas chez des étrangers. Il faut mettre fin à cette guerre ; par le sang qu'il a versé, je le demande à ceux qui n'ont pas commencé à rentrer en eux-mêmes ; quant à ceux qui ont commence ; ce combat ne doit pas suffire a les faire retourner en arrière. Qu'ils considèrent que la rechute est pire que la chute ; déjà, il voient ce qu'ils ont perdu ; qu'ils se fient à la miséricorde de Dieu, nullement à eux-mêmes, et ils verront Sa Majesté les conduire de Demeures en Demeures, et les introduire en un pays où ces bêtes féroces ne pourront ni les touchers ni les épuiser ; ils les assujettiront toutes et se moqueront d'elles, et ils jouiront de beaucoup plus de biens qu'ils ne pourraient en désirer, je le dis, même dès cette vie.

10 Je vous ai dit au début que j'ai écrit comment vous devez affronter les troubles que le démon suscite ici (Autobiographie, chap. 11 et 19) et qu'il ne s'agit pas, quand on commence à se recueillir, de s'y employer à la force du poignet, mais avec douceur, afin de s'y tenir plus longuement, je n'en parlerai donc pas davantage ici ; je dirai seulement qu'à mon avis il est très important d'en conférer avec des personnes expérimentées, car lorsque vous aurez à vaquer à des occupations nécessaires, vous imaginerez faillir gravement au recueillement. Tant qu'on ne l'abandonnera point, le Seigneur dirigera tout pour notre bien, même si nous ne trouvons personne pour nous instruire ; mais contre ce mal, l'abandon, il n'y a d'autre remède que de recommencer, sinon l'âme se perd un peu plus chaque jour, et encore plaise à Dieu qu'elle le comprenne !

11 Certaines pourront penser que puisqu'il est si grave de retourner en arrière, mieux vaudrait ne jamais commencer, et rester en dehors du château. Je vous l'ai dit au début, et le Seigneur lui-même le dit, celui qui vit dans le danger y périt (d'après Qo 3,27), et la porte d'entrée dans ce château est l'oraison. Songer que nous devons entrer dans ce château sans rentrer en nous-même, nous connaître, considérer cette misère, ce que nous devons à Dieu, et sans lui demander souvent miséricorde, c'est de la folie. Le Seigneur lui-même le dit : " Nul ne parviendra à mon Père si ce n'est par moi (Jn 14,6) " ; je ne sais s'il le dit en ces termes, je crois que oui ; et " Qui me voit, voit mon Père (Jn 14,9) ". Donc, si nous ne le regardons jamais, si nous ne considérons pas ce que nous lui devons et la mort qu'il a subie pour nous, je ne sais comment nous pouvons le connaître, ni agir à son service. Car la foi sans les oeuvres, et sans que ces oeuvres tirent leur valeur des mérite, de Jésus-Christ, notre bien, quelle valeur peut-elle avoir ? Et qui nous excitera à aimer ce Seigneur ? Plaise à Sa Majesté de nous faire comprendre tout ce que nous lui coûtons, que le serviteur n'est pas plus que son Seigneurs (Mt 10,24), que nous devons travailler pour jouir de sa gloire, et qu'il nous est nécessaire pour cela de prier, afin de ne pas vivre toujours en tentations (Mt 26,40).


TROISIÈMES DEMEURES

CHAPITRE PREMIER

Comme quoi nous ne sommes guère en sécurité tant que nous vivons dans cet exil, même si nous y avons atteint un degré élevé, et qu'il sied d'avoir crainte.

1 " Bienheureux l'homme qui craint le Seigneur (Ps 61,1) " : que dirons-nous d'autre à ceux qui, par la miséricorde de Dieu, ont remporté la victoire dans ces combats, et sont entrés, par leur persévérance dans les Troisièmes Demeures ? Sa Majesté a beaucoup fait en m'aidant à comprendre en castillan, le sens de ce verset, tant j'y suis inhabile. Certes, nous avons raison d'appeler cet homme-là bienheureux, car s'il ne retourne pas en arrière, à ce que nous comprenons, il est sur le bon chemin du salut. Vous verrez ici, mes soeurs, combien il importe de remporter la victoire dans les batailles précédentes ; car je tiens pour certain que le Seigneur ne manque jamais de donner au vainqueur la sécurité de conscience, ce qui n'est pas un mince avantage. J'ai dit : la sécurité, et je me suis mal exprimée, car il n'en est pas en cette vie ; comprenons donc toujours que je sous-entends : si l'âme ne s'écarte pas à nouveau du chemin dans lequel elle s'est engagée. :

2 C'est une fort grande misère que cette vie où nous devons vivre toujours comme ceux qui, l'ennemi aux portes, ne peuvent ni dormir ni manger sans armes, toujours inquiets qu'ils n'ouvrent quelque brèche dans cette forteresse. Ô mon Seigneur et mon Bien ! Comment voulez-vous que nous désirions une vie si misérable alors qu'il nous est impossible de ne pas vouloir et demander que vous nous en sortiez, sauf si nous avons l'espérance de la donner pour Vous, de la dépenser vraiment à votre service, et, surtout, de comprendre que telle est votre volonté ? Si vous le voulez, mon Dieu, mourons avec Vous, comme l'a dit saint Thomas (Jn 11,16), car vivre sans Vous, en redoutant de vous perdre à jamais, c'est mourir plusieurs fois, et rien d'autre. C'est pourquoi je dis, mes filles, que la béatitude que nous devons demander c'est d'être en sécurité dès maintenant, avec les bienheureux, car au milieu de ces craintes, quelle satisfaction peut trouver celui dont la seule satisfaction est de satisfaire Dieu ? Considérez que certains saints qui avaient ce bonheur à un bien plus haut degré, sont tombés gravement dans le péché ; et nous n'avons pas l'assurance que Dieu nous tendra la main pour en sortirs (je parle du secours personnel), et faire, comme eux, pénitence.

3 Vraiment, mes filles, j'écris ceci dans un tel état de crainte que je ne sais comment je l'écris, ni comment je vis quand j'y songe, et c'est bien souvent. Demandez, mes filles, que Sa Majesté vive toujours en moi ; sinon, comment se sentir en sécurité dans une vie aussi mal employée que la mienne ? Ne vous affligez pas d'entendre qu'il en est ainsi, comme vous l'avez souvent fait lorsque je vous en ai parlé, car vous me voudriez très sainte, et vous avez raison, je le voudrais bien, moi aussi. Mais qu'y puis-je, puisque c'est uniquement par ma faute que j'ai tant perdu ! Je ne me plaindrai point de Dieu, dont l'aide n'a pas suffi pour que vos voeux s'accomplissent ; je ne puis parler ainsi sans larmes, et je suis dans une grande confusion d'écrire quoi que ce soit pour vous qui pourriez m'instruire, moi. Il me fut bien dur d'obéir ! Plaise au Seigneur, puisque je le fais pour Lui, que cela vous serve à quelque chose, et que vous lui demandiez de pardonner à cette misérable effrontée. Mais Sa Majesté sait bien que je ne puis me flatter que de sa miséricorde, et puisque je ne puis nier ce que j'ai été, je n'ai d'autre remède que de m'en remettre à Elle, de me fier aux mérites de son Fils et de la Vierge, sa mère, dont je porte indignement l'habit que vous portez aussi. Louez-le, mes filles, d'être vraiment les filles de cette mère ; vous n'avez donc pas sujet de rougir de ma misère, puisque vous avez une si bonne mère. Imitez-la, considérez quelle doit être la grandeur de cette Dame et le bonheur de l'avoir pour patronne puisque mes péchés et le fait que je sois celle que je suis n'ont nullement discrédité ce saint Ordre.

4 Mais Je vous avertis d'une chose : bien que filles d'une telle mère, ne soyez pas sures de vous, car David était très saint, et vous voyez ce que fut Salomon. Ne vous prévalez pas de la clôture et de la pénitence où vous
vivez ; Dieu est le seul sujet de vos entretiens, vous vous exercez continuellement à l'oraison vous êtes si éloignées des choses du monde que vous les avez, vous semble-t-il, en abomination, tout cela est bon, mais ne suffit point, comme je l'ai dit, à nous délivrer de toute crainte ; continuez donc ce verset, et rappelez-le souvent à votre mémoire : BEATUS VIR, QUI TIMET DOMINUM (Ps 61,1).

5 Je ne sais plus ce que je disais, je me suis beaucoup écartée de mon sujet, dés que je pense à moi, mes ailes se brisent, je ne puis rien dire de bon ; je coupe donc court pour l'instant, et je reviens aux âmes qui sont entrées dans les Troisièmes Demeures : la faveur que le Seigneur leur a faite de passer outre aux premières difficultés n'est pas mince, mais très grande. Ces âmes, de par la bonté de Dieu, sont, je le crois, nombreuses en ce monde : vivement désireuses ne pas offenser Sa Majesté, elles se gardent même des péchés véniels et sont amies de la pénitence, elles réservent des heures au recueillement, emploient bien leur temps, s'appliquent aux oeuvres de charité envers le prochain, un ordre harmonieux règne dans leur langage, leurs vêtements, et dans le gouvernement de leur maison, si elles en ont. C'est, certes, un état souhaitable, il n'y a, semble-t-il, aucune raison de leur refuser l'entrée de la Dernière Demeure, le Seigneur ne la leur refusera point, si elles le veulent ; c'est une très belle disposition pour obtenir de lui toute grâce.

6 Ô Jésus ! Laquelle d'entre vous prétendrait ne pas vouloir un si grand bien, surtout après être passée par ce qu'il y a de plus ardu ? Non, personne. Nous disons toutes que nous le voulons ; mais il faut bien davantage pour que le Seigneur possède l'âme tout entière, il ne suffit pas de le dire, comme cela n'a pas suffi au jeune homme à qui le Seigneur demanda s'il voulait être parfaits (Mt 19,16-22). J'y songe depuis que j'ai commence à parler de ces Demeures, car nous sommes ainsi, à la lettre, et les grandes sécheresses dans l'oraison viennent habituellement de là, bien qu'il y ait aussi d'autres causes. Je ne dis rien des épreuves intérieures, et elles sont intolérables, que bien des bonnes âmes subissent sans être moindrement coupables et dont le Seigneur les délivre toujours avec de grands bénéfices, ni de celles qui souffrent de mélancolie, ou d'autres maladies. Enfin, en toutes choses, nous devons faire la part du jugement de Dieu. Quant à moi, je crois que la cause la plus habituelle de la sécheresse est celle que j'ai dite ; car ces âmes, qui voient que pour rien au monde elles ne commettraient un péché mortel, ni même souvent un véniel de propos délibéré et qui emploient bien leur vie et leur fortune, s'impatientent pourtant de voir se fermer devant elles la porte qui conduit à l'appartement de notre Roi dont elles s'estiment les vassales, et elles le sont effectivement. Mais bien que le Roi de la terre ait de nombreux vassaux en ce lieu, ils ne pénètrent pas tous dans sa chambre. Entrez, entrez, mes filles, à l'intérieur ; dépassez vos oeuvres mesquines, car en tant que chrétiennes, vous devez tout cela et beaucoup plus ; il vous suffit d'être les vassales de Dieu : ne demandez pas trop, vous n'auriez plus rien. Regardez les saints qui sont entrés dans la chambre de ce roi, vous verrez quelle différence il y a entre eux et nous. Ne demandez pas ce que vous n'avez pas mérité ; nous avons beau Le servir, l'idée que nous, qui avons offensé Dieu, puissions mériter ce qu'il accorde aux saints, ne devrait même pas nous venir à la pensée.

7 Ô humilité, humilité ! Je ne sais pourquoi je suis tentée, dans ce cas, de ne pas me résoudre à croire que celles qui font un tel cas de ces sécheresses ne manquent pas un peu d'humilité. Je répète qu'il ne s'agit pas des grandes épreuves intérieures dont j'ai parlé, elles sont beaucoup plus pénibles qu'un manque de ferveur. Mettons-nous à l'épreuve nous-mêmes, mes soeurs, ou que le Seigneur nous éprouve, il s'en acquitte très bien, quoique souvent nous ne voulions pas le comprendre, et revenons à ces âmes si bien disposées ; voyons ce qu'elles font pour Dieu, et nous verrons aussitôt que nous n'avons nulle raison de nous plaindre de Sa Majesté. Si lui tournant le dos, nous nous en allons tristement, comme le jeune homme de l'Évangile, quand Elle nous dit ce que nous devons faire pour être parfaits, que voulez-vous que fasse Sa Majesté, qui doit mesurer sa récompense à l'amour que nous lui portons ? Et cet amour, mes filles, ne doit pas être fabriqué par notre imagination, mais prouvé par des oeuvres ; et ne croyez pas que le Seigneur ait besoin de nos oeuvres, mais de la décision de notre volonté.

8 Nous qui portons l'habit d'un Ordre religieux, qui l'avons pris volontairement, et avons quitté toutes les choses du monde et ce que nous possédions pour Lui (n'aurions-nous quitté que les filets de saint Pierre, cela semble beaucoup à qui donne tout ce qu'il a), nous croyons avoir déjà tout accompli. C'est une fort bonne disposition si nous persévérons et si nous ne retournons pas nous fourrer à nouveau au milieu de la vermine des premières pièces, n'en aurions-nous que le désir, il n'y a pas de doute, si nous persévérons dans ce dénuement et cet abandon de tout, nous atteindrons notre but. Mais ce sera à une condition, que je vous demande de bien considérer : regardez-vous comme des serviteurs inutiles, selon l'expression de saint Paul ou du Christ (Lc 17,10), et croyez que rien n'oblige Notre-Seigneur à vous faire de telles faveurs ; votre dette est même d'autant plus forte que vous avez plus reçu. Que pouvons-nous faire pour un Dieu si généreux, qui est mort pour nous, qui nous a créés et nous donne l'être ? Ne pouvons-nous nous estimer très heureuses quand il se dédommage un peu de ce que nous lui devons pour tous les services qu'il nous a rendus, sans lui demander de nouvelles faveurs et de nouveaux régals ? (J'ai employé à contre coeur ce mot de service, mais c'est ainsi, il n'a fait que nous servir tout le temps qu'il a vécu sur la terre.)

9 Considérez bien, mes filles, certaines des choses qui sont marquées ici, quoique confusément, car je ne sais m'expliquer mieux. Le Seigneur vous aidera à les comprendre pour que dans les sécheresses vous puisiez de l'humilité, et non de l'inquiétude, comme le voudrait le démon ; croyez qu'à celles qui sont vraiment humbles, même s'il ne leur accorde point ses délices, Dieu donnera une paix et une acceptation qui les rendront plus heureuses que certains de ceux qu'Il régale. Car souvent, comme vous l'avez lu, Sa Divine Majesté réserve ces douceurs aux plus faibles ; je crois toutefois qu'ils ne les échangeraient pas pour la force de ceux qui vivent dans la sécheresse. Nous sommes enclins à préférer les joies à la croix. Éprouve-nous, Seigneur, Toi qui sais la vérité, afin que nous nous connaissions.

CHAPITRE II

Suite du même sujet. Des sécheresses dans l'oraison, de ce qui peut s'ensuivre, de la nécessité de nous mettre à l'épreuve. De la manière dont le Seigneur éprouve ceux qui ont atteint ces Demeures.

1 J'ai connu quelques âmes, je crois même pouvoir dire que j'en ai connu beaucoup, qui, parvenues à cet état, ont vécu de longues années dans cette droiture et cette harmonie, corps et âme, pour autant que l'on puisse en juger ; elles semblaient avoir déjà maîtrisé le monde, ou du moins être bien déçues par lui, mais lorsque Notre-Seigneur les soumit à des épreuves peu importantes, leur inquiétude fut telle, leur coeur fut si serré, que j'en fus éberluée et même fort effrayée. Il est vain de les conseiller, elles sont depuis si longtemps consacrées à la vertu qu'elles se croient capables de l'enseigner aux autres et n'avoir que trop de raisons de regretter ces épreuves.

2 Enfin, pour consoler ces personnes, je n'ai trouvé d'autre remède que de beaucoup compatir à leur peine (c'est pitié, à la vérité, que de les voir asservies à toutes ces misères), sans contester leurs raisons ; elles imaginent toutes qu'elles souffrent pour Dieu, et n'arrivent donc pas à comprendre que c'est une imperfection. C'est une idée fausse de plus de la part de gens si avancés ; nous ne pouvons nous étonner qu'ils s'en affligent, bien qu'à mon avis, semblable affliction devrait être passagère. Dieu veut souvent que ses élus ressentent leur misère, Il détourne un peu sa faveur, et il n'en faut pas plus, on peut le dire hardiment, pour que nous ayons tôt fait de nous connaître. On comprend immédiatement que c'est une épreuve, car ils comprennent, eux, très clairement, leur faute ; il leur arrive d'être peinés de leur impuissance à maîtriser l'affliction que leur causent des choses terrestres de bien peu de poids plus que de l'épreuve elle- même. J'y vois une : grande miséricorde de Dieu, car bien que ce soit une faute, elle fait beaucoup gagner en humilité.

3 Mais il n'en est pas ainsi des personnes dont je parlais, car, comme je l'ai dit, elles canonisent ces choses dans leur pensée, et elles voudraient que les autres les canonisent également. Je veux vous citer quelques cas, afin que nous nous connaissions et nous mettions nous-même à l'épreuve avant que le Seigneur ne nous éprouve ; nous aurions grand avantage à être lucides et les premières à nous connaître.

4 Une personne riche, sans enfants, sans personne pour qui elle puisse désirer de la fortune, vient à perdre une partie de ses biens, mais ce qui en reste suffit à lui assurer le nécessaire pour elle, sa maison, et même au-delà. Si cet homme se montrait aussi trouble, aussi inquiet que s'il ne lui restait plus un pain à manger, comment Notre-Seigneur lui demanderait-il de tout quitter pour Lui ? Mais un autre s'afflige parce qu'il veut pouvoir donner aux pauvres. Je crois que Dieu préfère à cette charité que je me soumette à la volonté de Sa Majesté, et tout en cherchant à recouvrer mes biens, que je maintienne mon âme en paix. S'il n'y parvient pas, le Seigneur ne l'ayant pas élevé aussi haut, à la bonne heure, mais qu'il comprenne que cette liberté d'esprit lui manque ; il se disposera alors à la recevoir du Seigneur, car il la lui demandera. Une personne a largement de quoi manger, et même plus qu'il ne lui en faut ; un moyen s'offre à elle d'accroître sa fortune ; prendre ce qu'on lui donne, à la bonne heure, passons ; mais le rechercher, et lorsqu'elle l'a, en rechercher plus, et plus encore, quelles que soient ses bonnes intentions, (et elle doit en avoir, car, comme je l'ai dit, il s'agit de personnes d'oraison, et vertueuses), elle n'a pas à craindre de monter jusqu'aux demeures les plus proches du Roi.

5 Il en est de même s'il leur arrive d'offrir quelque prise au mépris ou si on porte légèrement atteinte à leur honneur ; quoique Dieu leur fasse souvent la grâce de bien le prendre, (notre Bien est très bon, Il est enclin à favoriser publiquement la vertu, pour que l'estime dans laquelle on tient ceux qui l'ont servi ne souffre en rien) ils ne sortent pas de sitôt d'un état d'inquiétude insupportable. Dieu secourable ! Ne s'agit-il pas de gens qui considèrent depuis longtemps combien le Seigneur a souffert, qui savent que la souffrance est bonne, et même qui la désirent ? Ils voudraient que chacun organise sa vie aussi bien qu'ils le font, et encore plaise a Dieu qu ils ne s'imaginent pas qu'ils souffrent par la faute des autres et ne s'en octroient point, en pensée, le mérite.

6 Il vous semblera, mes soeurs, que je parle mal à propos, et pas a votre adresse : on ne voit ici rien de semblable, puisque ne possédant aucun bien nous n'en voulons pas, nous n'en recherchons pas, et que nul non plus ne nous fait injure. Ces comparaisons ne se rapportent donc point à ce qui se passe ici, mais on en déduit beaucoup d'autres choses qui pourraient s'y passer et qu'il ne serait ni bon ni utile d'indiquer. Elles vous aideront à reconnaître si vous êtes bien dépouillées de tout ce que vous avez quitté ; car de petites choses s'offrent à vous, moins graves, certes, que tout cela, qui peuvent vous aider à vous éprouver et à comprendre si vous êtes maîtresses de vos passions. Et croyez-moi, l'affaire n'est pas de porter ou non un habit religieux, mais de chercher à nous exercer dans la vertu, de soumettre en toutes choses notre volonté à celle de Dieu, et de conformer notre vie à ce que Sa Majesté dispose ; ne désirons point que notre volonté se fasse, mais la siennes (Lc 22,42). Tant que nous n'en serons pas là, comme je l'ai dit, de l'humilité ! C'est l'onguent de nos plaies ; car si nous sommes vraiment humbles, même s'il tarde un peu, le chirurgien, qui est Dieu, viendra nous guérir.

7 Les pénitences de ces âmes sont aussi bien organisées que leur existence. Elles aimaient beaucoup leur vie mise au service de Notre-Seigneur, et tout cela n'est point mauvais, mais elles ne se mortifient que très prudemment, pour que leur santé n'en pâtisse point. Ne craignez pas qu'elles se tuent, elles sont en possession de leur raison, l'amour ne les fait pas encore déraisonner. Mais je voudrais qu'elle nous incite, notre raison, à ne pas nous contenter toujours de cette manière de servir Dieu, à pas traînant, car nous n'arriverions jamais au bout du chemin. Et comme nous imaginons être toujours en marche, et que nous nous fatiguons, (car croyez-le, cette route est accablante), ce sera déjà bien que nous ne nous perdions point. Mais pensez-vous, mes filles, qu'il puisse être bon, lorsqu'il nous est loisible d'aller d'un pays à un autre en huit jours, de faire le trajet en un an, au hasard des auberges, de la neige, des pluies, et des mauvais chemins ? Ne vaudrait il pas mieux en finir une bonne fois ? Car à tout cela s'ajoute le danger des serpents. Oh ! les bons exemples que je pourrais en donner ! Plaise à Dieu que je sois sortie de là, il me semble bien souvent que non.

8 Nous sommes de si grands cerveaux que tout nous offense, car nous avons peur de tout ; ainsi, nous n'osons pas aller de l'avant, tout comme si nous nous savions capables d'atteindre ces Demeures, et que d'autres fassent le chemin. Puisque c'est impossible, prenons courage, mes soeurs, pour l'amour du Seigneur ; remettons notre raison et nos craintes entre ses mains oublions cette faiblesse naturelle, dont il nous arrive de beaucoup tenir compte. Le soin de nos corps regarde nos supérieurs à eux d'y pourvoir ; le nôtre est de marcher à vive allure pour voir ce Seigneur ; car les aises dont vous jouissez ont beau être nulles, à peu de choses près, le souci que nous avons de notre santé pourrait nous induire en erreur. Nous ne nous en porterons d'ailleurs pas mieux, je le sais ; je sais aussi que ce qui concerne le corps n'est pas une affaire, c'est secondaire ; l'acheminement dont je parle s'accompagne d'une grande humilité ; si vous m'avez comprise, j estime que là est l'erreur de celles qui n'avancent point ; nous n'avons fait, nous semble-t-il que quelques pas, nous le croyons, tandis que l'allure à laquelle marchent nos soeurs doit nous paraître très rapide, et non seulement nous devons désirer qu'on nous tienne pour la plus misérable de toutes, mais faire ce qu'il faut pour cela.

9 Alors, cet état sera excellent ; sinon, nous y vivrons dans mille peines et misères, car nous y subissons de lourdes épreuves tant que nous n'avons pas renoncé à nous-même et que nous portons la charge de cette terre de misère ; cela n'est pas le cas de ceux qui s'élèvent vers les autres Demeures. Là, le Seigneur ne manque pas de les récompenser ; juste comme il l'est, et même miséricordieux, il nous donne toujours beaucoup plus que nous ne méritons lorsqu'il nous accorde des joies bien supérieures à celles que nous pourrions trouver dans les régals et distractions de la vie ; mais ne pensez pas qu'il leur prodigue des douceurs spirituelles, sauf rare exception : il les invite à voir ce qui se passe dans les autres Demeures, pour qu'ils se disposent à y pénétrer.

10 Vous allez imaginer que contentements et plaisirs spirituels sont une seule et même chose, et vous demander pourquoi j'emploie des mots différents. A moi, il me semble que la différence est très grande, mais je puis me tromper. Je dirai ce que j'entends ainsi lorsque je parlerai des quatrièmes Demeures qui vont suivre ; ce sera plus opportun, puisqu'il faudra, alors expliquer certains des plaisirs que le Seigneur y procure. Même si cela semble inutile, vous aurez l'avantage de comprendre ce que sont ces deux choses, et vous pourrez rechercher ce qu'il y a de mieux ; les âmes que Dieu élève à cet état y trouveront un grand réconfort, et celles qui croient tout avoir une grande confusion ; si elles sont humbles, elles seront portées à l'action de grâces. Mais si elles manquent quelque peu d'humilité, leur affliction intérieure sera sans objet, car la perfection ne consiste pas dans des plaisirs intérieurs, elle est l'apanage de celui qui aime le plus ; à lui, la récompense, comme à celui qui agit avec justice et vérité.

11 Vous vous direz peut-être : à quoi bon parler de ces faveurs intérieures, en donner l'explication, puisque c'est, en fait, la vérité ? Je l'ignore, demandez-le à celui qui me commande d'en écrire, je ne suis pas obligée à discuter avec les supérieurs, mais à leur obéir, sous peine de mal agir. Ce que je puis vous dire en toute sincérité, c'est que lorsque je n'avais pas l'expérience de ces faveurs, ni même l'idée que je l'aurais de ma vie, (à juste titre, mais j'eusse été bien heureuse de savoir, ou, à l'occasion ; de comprendre, que j'étais un peu agréable à Dieu), quand je lisais dans les livres les faveurs et les consolations que le Seigneur accorde aux âmes qui le servent, j'en avais une grande joie, et mon âme y trouvait le sujet de vives louanges à Dieu. S'il en était ainsi d'une âme aussi misérable que la mienne, celles qui sont bonnes et humbles le loueront bien davantage ; et quand il n'y en aurait qu'une seule pour le louer une seule fois, il est très bon de le dire, ce me semble, et que nous comprenions le contentement et les délices que nous perdons par notre faute. D'autant mieux que si ces faveurs viennent de Dieu, elles sont chargées d'amour et de courage, on peut donc continuer à marcher sans peine, et croître en bonnes actions et en vertu. Ne penser pas que peu importe de nous y disposer ; lorsque nous ne sommes pas en faute, le Seigneur est juste, et Sa Majesté vous donnera par d'autres voies ce qu'Elle vous ôte par celle-là ; Sa Majesté a ses raisons, et ses secrets sont bien cachés ; du moins nous donnera-t-elle ce qui nous convient le mieux, sans aucun doute.

12 Celles qui, par la bonté du Seigneur, sont parvenues à cet état, (ce n'est pas une petite miséricorde, comme je l'ai dit, car elles sont bien près de monter plus haut), auraient grand intérêt à beaucoup s'exercer à la prompte obéissance ; même pour ceux qui n'appartiennent pas à un Ordre Religieux, il serait fort utile, comme le font de nombreuses personnes, d'avoir quelqu'un à qui recourir pour ne faire en aucun cas notre volonté propre, car c'est ordinairement ce qui nous nuit ; ne le choisissons pas d'humeur analogue à la notre comme on dit, aussi prudent que nous le sommes, mais recherchons-en un qui soit bien désabusé de toutes les choses du monde. Il est extrêmement profitable d'être en rapports avec quelqu'un qui le connaît, pour mieux nous conmaître ; et puis, lorsque des choses qui nous paraissent impossibles se révèlent possibles pour d'autres, et même douces, nous prenons courage ; leur envol, semble-t-il, nous enhardit à voler, comme les petits des oiseaux qui font leur apprentissage, et si, dans l'immédiat, ils ne volent pas très loin, ils imitent, peu à peu, leurs parents ; on fait ainsi de grands progrès, je le sais. Quelle que soit leur détermination de ne pas offenser le Seigneur, ces personnes feront bien de ne pas s'exposer à l'offenser : elles sont tout près des premières Demeures, et pourraient facilement y retourner. Leur force n'est pas fondée sur un terrain solide, comme c'est le cas des personnes qui, déjà exercées à souffrir, connaissent les tempêtes du monde et ont des raisons de ne guère les redouter, ni de désirer ses joies une grande persécution comme celles que le démon sait très bien agencer pour nous nuire pourrait les y ramener ; promptes à éviter le péché à autrui, ces âmes seraient incapables de résister à ce qui pourrait leur arriver en cette occurrence.

13 Considérons nos fautes, et laissons là celles des autres, car le fait de ces personnes si bien organisées est souvent de s'offusquer de tout, et, d'aventure, ceux dont nous nous offusquons pourraient bien avoir beaucoup à nous apprendre d'essentiel. Il se peut que dans l'attitude extérieure, la manière d'être, nous les surpassions, mais le principal n'est pas là, bien que ce soit important, mais il n'y a pas de quoi vouloir que tout le monde suive immédiatement le même chemin que nous, ni de nous mettre à les instruire des voies spirituelles, alors que, d'aventure, nous les ignorons ; car nous pouvons faire un usage fort erroné, mes soeurs, de ce désir que nous donne Dieu d'aider les âmes. Il vaut donc mieux nous en tenir à notre Règle ; " Chercher à vivre toujours dans le silence et l'espérance (Is 30,15) ) ", et le Seigneur prendra soin de des âmes. Tant que nous ne négligerons pas de supplier pour elles la Majesté, nous serons fort utiles, avec Sa grâce. Qu'Elle soit bénie à Jamais.

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